Poème:Frère D’ Arme.

La première fois je m’en souviens, Dieu que j’étais peu fière,
Toi, l’armoire kabyle, avec un accent à couper à la rapière.
C’était le début du commencement de la fin de la guerre,
Et on y a tous laissés, un ami, un oncle, ou un frère.

Seul, isolé, en abandon-faciès sur ce haut plateau,
J’étais logé en guitounes à la même enseigne que toi,
On se ressemblait comme deux gouttes d’eau,
Malgré mon patronyme de sang vieux « François »

Mais les têtes de cons se posent pas de question,
Il te juge sur la couleur de ta gueule ou sur ton nom,
Et rien n’y a fait, et j’ai pris de vie ma plus belle branlée…
Alors tu m’as reçu à ta table, et tu as soigné mes plaies.

J’étais là, sans famille, j’étais à merci-corvéable,
Tu n’étais guère mieux loti, tu étais « la putain d’arabe »
Mais que tu avais fière allure quand tu criais « À moi, Arvernes »
Tu étais mon ancien j’ai tout appris de toi, c’était en Auvergne.

Si malgré l’érosion du temps je suis au bord de la petite larme,
C’est que tu es resté gravé a jamais dans mes souvenirs
Avec ta « déglingue » de troufion j’entends encore ton rire.
Tu étais et tu resteras, car nous étions frères d’armes.