Poème:Dans Les Nuages

Vous voyez en leur cœur la banale tristesse
D’un temps gris et couvert annonciateur de pluies,
Ou pire de sombres orages de détresse
Qui peuvent vous noyer dans les eaux de l’ennui.
Jadis les oracles devinaient la fureur
Des combats de leurs dieux luttant au-dessus d’eux,
Ainsi que les années à vivre de terreurs
Par la faim, la soif ou changés en lépreux.

Moi, mes yeux fatiguent devant un désert bleu
Sans la moindre brume qui puisse l’adoucir,
Les cumulus manquent pour me rendre heureux,
J’admire l’aube de feu qui les fait roussir.
Quand d’autres suffoquent sous l’épaisseur de plomb
Qui masque lumière et lointain paysage,
J’arpente d’étranges continents en surplomb
Et mon esprit vole libre hors de sa cage.
Je vois des rocs formant montagnes et coteaux
Ou de grands océans aux abysses légers,
Je ne les regarde pas en sombres rideaux,
Mais comme de beaux lacs survolés par les geais.
Je chemine parmi tous ces grands monolithes
Qui pavent mes pensées des couleurs des galets
Doucement irisés des rayons troglodytes
Comme les arcs-en-ciel d’un brouillard étoilé.
Enfin, ne pas vouloir trouver un seul chemin
Pour juste se perdre d’espoirs sans lendemain,
Voler avec l’oiseau presque main dans la main,
Planer dans l’écume riant tel un gamin ;
Et l’esprit allongé dans la langueur ouatée,
Trouver les refuges et repos mérités
Au milieu des rêves aux idées éventées
Par le flux et reflux d’images agitées.

Mais j’admets volontiers subir tous ces mirages,
Seul être découvreur de merveilleux rivages,
J’avance sans âge dans mes curieux voyages
En posant ma tête là-haut dans les nuages.