Poème:Ecriture Semi-Automatique

Moi :
Au fond de l’inconciliable, dehors ou dedans, il y a une fenêtre pourtant. Dans la terre ou dans les airs, au fond peu importe. Sans doute que l’espace est important. Sans reste, je demeure cloué à mon néant, crucifié l’espace d’un instant entre les deux fenêtres. Ecartelé sans cesse, et sans cesse en mouvement ; je suis l’oscillation de mon propre état des lieux, le chef-lieu, le maître mot, le roi divin d’un paradis sans fin.

Elle :

Le paradis s’assombrit, engouffré dans la spirale sans frein du tiraillement des tracasseries jacassantes…

Moi :

Il n’en fallut pas moins de plusieurs micro-secondes pour comprendre rien. Rien ce n’est toujours que quelque chose. Les fenêtres sont closes. Les roses écloses derrière la vitre ne font que teinter de rosée les perles de buée. Les trépanations, au sein des pays riches me morfondent. Je ne suis pas sûr de l’inconciliable. Mais une chose est certaine ; il n’est de plus valeureux que celui qui saigne. C’est difficile de voir à travers la vitre. Heureusement il y a des portes-fenêtres de libre.

Elle :

Je ne vois plus que l’ombre, mon ombre, brume consumée de noir et de paillettes de soleil, mutisme au flamboiement délyrique. Tu me rends au mot. Tu me prends au verbe. Je dispose les lettres une à une dans l’ellipse des combinaisons inimaginables.

Et la paix fleurit dans le soupir d’une larme.
Moi :

Il y a beaucoup d’insectes dans le cosmos ; déravitaillement au creux des galaxies aphones. Il y a beaucoup d’animaux gisant par dessus le monde ; des faims et de la soif qui sonne le glas de la fin des ondes. Je suis sur une planète creuse et avide de terres-plein. Je gis par-delà ce qui m’entoure ; je fuis au-delà de ceux qui me fuient. Je sais, ou peut être ne sais-je pas l’absurdité du monde, mais en tous cas j’ignore si l’intelligence est féconde. Je brille, je me consume, puis je scintille à nouveau. C’est bête ; je n’ai presque plus d’allumettes.

Elle :

Mais il reste un peu de cette verve sacrée des cris qui se répondent comme les murmures désenclavés d’âmes exténuées. Au bout, je boue.

Moi :

Ce n’est pas grave. Je gave les oies cendrées, je parle aux oreillers. Le rêve me surprend, tandis que je me pends à rêver. La fumée s’en va. Il en reste des cendres. Les oies vomissent comme des cendriers pleins les parpaings dans leurs cous. Je n’y comprends plus rien. Pourquoi ai-je gavé les oies ? Je ne voulais entendre que leurs paroles, et pourtant, leurs guiboles font assez de bruit pour que je les entende. M’attendais-je à des sons venus de leurs becs ? Bien sûr que oui. Les arbres jaunissent ; eux aussi dégueulent leur état. L’automne est bien ingrat. Mais le printemps l’est encore plusse.

Elle :

Les saisons convergent à l’apogée du rêve, ravissant des écueils de rasades épiques, saisissant d’un mouvement enroulé les images piétinées, assouvissant encore et encore les voix silencieuses.

Moi :

J’ai peur des girafes. Elles sont si hautes sur pattes. Elles pourraient bien englober la terre entière, d’un seul mouvement avancé. Mais il y a aussi des hommes qui avancent comme des girafes. Je ne sais pas ce qui leur prend d’avancer ainsi, mais ils détruisent tout sur leur passage. Alors que les gracieuses, les majestueuses, les grandes girafes, ne font qu’à peine écraser un peu les herbes de la savane, qui de toute façon repousseront. Les loups à la gueule sanguinolante avancent doucement. Le sang des moutons et des brebis s’éparpille sur la terre, et tandis qu’il nourrira les baobabs, de bas en haut, moi, de haut en bas je contemple mes larmes sèches qui tombent.

Elle :

La fin se constelle de ces sanglots asséchés, de la sève impure de ces arbres géants et de ces jeux vautrés dans les entrailles du poêtre.