Poème:J’ai Oublié

Mes mains tremblent et mes yeux sont figés
Mon front sue et mes jambes vont lacher.

C’est un bel après-midi de printemps
Sous le soleil les fleurs s’ouvrent
L’herbe humide brille et couvre
La terre écrasée, victime du temps.

Et moi, je suis là
Au milieu de cela
A attendre… attendre sur quoi ?

Je tremble de plus en plus
Je me retourne, je les vois
Tous muets, tous comme moi
Condamnés par ce processus

D’un moment à l’autre tout pourra finir
Je préfèrerais que rien n’aie commencé
Mais la fin, dans le fond, peut m’aider
Je me fiche de mourir et de souffrir.

Haïssant les hauts-placés bien au chaud
Dans leur salon, sur leur sofa en peau
Haïssant chaque être, häissant chaque chose
J’en ai oublié l’amour et l’odeur des roses.

Tous, ici, défigurés par la peur
La fatigue nous ronge de l’intérieur
Haïssant l’ennemi et l’allié
Haïssant la vie et la destinée.

Voilà, je peux l’apercevoir
Le signal vient d’être lancé
Plus le choix, il faut y aller
S’élancer droit dans le noir ;

Je n’ai pas envie de courir
Mais mes jambes sont parties
Je tremble encore comme une fille
Je n’ai pas envie de mourir.

On nous a dit que la victoire
Si on fonce est certaine
Si on laisse réagir notre haine
Il n’y aura pas d’échappatoire.

Je le sais, on nous a menti
Derrière cette ligne que j’aperçois
Se tient notre enfer… ou paradis ?
Je sens la peur frémir en moi.

Voilà, je peux l’apercevoir
La mort qui vient me chercher
Les premiers qui commencent à tomber
Et moi qui vait me transformer

En une bête sans sentiments
Dans le but est de tuer
Tuer avant de sombrer
Résister le plus longtemps.

Ici, dans ce champs de bataille
Notre but est de survivre
Et nons pas, hélas, de vivre
Car j’ai oublié l’odeur de la paille

J’ai oublié la beauté et l’amour
J’ai oublié la nuit et le jour
J’ai oublié, oui j’ai tout oublié
Et bientôt j’aurais même oublié…

D’avoir un jour vécu.