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Poeme : Alpha Tauri



A Propos

Poème en sept parties sur la parole, le corps et l’autre.

Alpha Tauri

I- A l’écoute du silence

Dans le ventre du chaos, les rêves s’émeuvent,
Cherchant à la source primitive leur mère
Ensommeillée, qui vit de ses enfants du fleuve ;
Cours de paroles s’évaporant dans les airs.

Les nuages s’étendent, couvrant les reflets,
Les doubles s’évoquent dans le ciel assombri,
Et dans les premières transparences de la nuit
Renaît le langage de son frère muet,

Le mystère enfoui magnétise les pensées,
Elles glissent sans cesse, sans perdre la face
Toutes convulsées par des unions insensées,
Entre amour et haine et désir… Et ce qui passe.

Inquiètes, elles cherchent le mot libérateur,
La phrase chantante, le feu inspirateur,
Elles vivent la douleur d’une eau qui s’enflamme,
Vivant l’être même comme un mensonge infâme.

Il suffirait d’une étincelle pour éteindre
La faible crécelle de cette voix sans timbre,
Comme carrousel sans couleur d’un mauvais rêve
Prenant avec lui les étoiles qui se lèvent,

Il suffirait d’une oraison pour endormir
Les lettres nerveuses s’oubliant dans des mots,
Et pleines d’orgueil se refusent à mourir
Pour renaître, symboliques, au ciel nouveau.

Et pourtant, c’est toujours vaguement mystérieux
D’éclaircir une voix nouvellement éclose,
De l’ouvrir, tendrement sans altérer sa prose,
Puis la saisir, sans violence, au velours des yeux.

Les mots dégagent eux-mêmes des parfums
Entêtants
Et la pensée orfévrée à l’or fin
Élégant
Se redécouvre vivace et sauvage
Sa chair écrite à l’encre des orages
Du printemps.

II- timidité
« Et soudain tout se fige,
Je chasse l’âme… » Patrice de la Tour du Pin

Ce sont les conversations sans malversations
Ni déprédations de nos deux situations,
Car les espaces ouverts entre nos syllabes
Nous guident dans le ciel comme un grand astrolabe.

Des esquisses glissent sur l’espace lisse
Et brillant qui surplombe des baisers très sombres,
Couvrant la ténébreuse origine en lice
Avec la tentation d’un éveil de pénombre.

Pendant ce temps là, l’œuvre de l’amour de soi
Médite un complot dans les cavernes du moi,
Refusant de se recueillir devant l’idole
Édifiée pour le mariage de nos paroles.

Elle prétend que ce n’est vraiment pas son affaire
Que de s’entretenir en dehors de sa sphère,
Si longuement forgée avec monotonie
Afin de s’endormir dans ses cosmogonies !

Alors d’orgueil, elle se drape de suffisance,
Séduisante et rebelle dans un vase clos,
Ses yeux berceuses pour assoupir sa méfiance
La revêtent d’un halo de coquelicots…

Toute la flore de l’innocence fébrile
Se replie alors dans son silence premier
Et craint par les mots de se rendre volatile
Comme un oiseau que le chasseur tient en respect.

III- Ténèbres
« The sun is far away, Echoes and circles »
Ulver

Loin dans nos yeux se murmurent les nuits passées
A forger la lueur, soupirante aux papillons,
Qui persistent dans ta prunelle ressassée
Par nos regards persistants en leurs floraisons.

Puisque je dois te quitter, que mon corps ne soit
Qu’un embarcadère dans un mouchoir de soi,
Agité par les rêves restés au rivage
Qui nous vivent dans la distance d’un visage.

Brève épine de chair

Dire que je t’aime dans les courants contraires
Me plonge dans un océan recommencé
A chaque syllabe du sang volontaire
Qui s’abîme au méridien de son cœur glacé ;

Que dire dans ces moments d’extrême détresse ?
Quand le rêve n’est que l’ample répétition
D’un regard perdu dans le mien et ses promesses,
D’un amour qui prend l’aspect d’une prédiction ?

Dans la plaine de nuit j’ai cueilli un nuage,
Sur les rebords d’un lac j’ai cueilli une rose,
Et c’est en cueillant que j’ai bâti mon langage
Qui glane le réel en chapelet de chose.

Une requête aux étoiles semble impossible,
Quand je partage mon secret avec la lune
Qui métamorphose mes paroles sensibles,
Comme l’envers lumineux d’une écorce brune ;

Je sens pourtant bien le désarroi du désir…
Ces nuits que je passe pour trouver une remède
Au mentir, je veux les dédier à ton sourire
Qui lève le théâtre quand j’appelle à l’aide ;

Je ne veux pas d’oraison funèbre
Que notre joie chasse les ténèbres.

IV- Le faux clair de lune
« Omnia jam fient, fieri quae passe negabam » Virgile

Dans le ciel, il y a des épaves de sang
A l’heure où la lumière se fond dans la nuit,
Et puis, dans la pluie immortelle du couchant
Fleurissent nos fleurs en un bouquet infini.

Je n’ai pas la clef sombre
Du mystère des faux clairs de lune
Où le désir se croit complet
Alors qu’il est par toi, au sommet de ses métamorphoses
Étranges…

Je me sens comme un monstre exalté
Par un œil rouge qui comprime ma poitrine,
Et à l’orée du bois, très proche de toi, j’essaye de mordre
Car je veux perdurer ainsi au sommet de ma lumière,
Et je veux marquer ta peau par une violence
Qui n’a pourtant rien d’inquiétant,
C’est la violence d’un être suturé à une promesse qu’il ne connaît pas.
Il éprouve intensément
Les points.

Il faudra pourtant rouvrir les plaies
Pour signer d’autres pactes de sang,
Qui s’en vont valser avec le temps de nos absences,
Et le violon de nos espaces jouera d’amples variations
Sur la blessure,
Celle qu’on aime et qui se décline pour que l’on apprécie mieux
Notre réelle présence l’un à l’autre,
La présence qui brûle tant elle signe la vérité de notre chair…

Au sommet de nos lumières,
A l’orée de notre œil rouge dans le soir,
Reflets des soleils en perpétuelle résurrection,
Nous refusons l’éternité que promettent
Les faux clairs de lune.

V- Le corps sage
« (… ) Il oblige ainsi au réveil des régions de conscience obscurcies ».
Michel Butor

L’impensé est une douleur nécessaire
Pour que la parole ne meurt pas de l’hiver,
Qui grandit entre les silences planétaires,
Des mots qui veulent s’émanciper de la chair
Pour aller vers toi.

Toute parole ressemble à une conquête,
A un lever de jour sur la neige du rêve,
Un soleil qui bat la mesure des trop brèves
Partitions intimes, de nos cœurs qui cliquettent ;

Elle me manque la parole chaude du souffle,
Comme un vent qui viendrait d’ailleurs, encore lointain,
D’un corps si effrayé qu’on l’oublie dans les houles
Des guerres océanes, d’une âme au matin
D’elle-même, cherchant à vaincre ses limites,
Sans savoir que c’est la chair et le sang qui l’invitent.

Le corps est une loi qu’éprouve le langage,
Il sait qu’il est le familier, l’amant transi
D’un vaste domaine où ses souvenirs s’engagent,
Fertilisant la terre d’un monde endormi ;

Et ma pensée demande sa main à mon corps,
Qu’il ne soit plus qu’un reliquaire discret,
Mais le foyer chaleureux des mots qui s’aurorent
Aux nuages pourpres du sang, à mon chevet ;

L’impensé est une doublure du désir
Une obscurité qui dévoile les étoiles

VI- Vestiges
« Les heures s’en allaient très lentes,
Un soir de brume, un soir d’hivers,
Un soir de morts et d’absentes,
Où l’on rêve aux rêves d’hier ».
Rémy de Gourmont

Comme pour m’empêcher de le dire à nouveau,
Les colères anciennes se changent en murmures
Doucereux dans leurs amples manteau de fourrures,
Puis elles heurtent en silence mes cœurs ancestraux.
Ils dansent comme les planètes d’une voûte
Qui est la mienne quand je me dore à la lune,
Embrassant les phases pour mon corps qui écoute,
Pour rejoindre les souvenirs de ma lagune.

Je dois continuer en moi comme un assassin,
Traquant les ombres de mon couteau de lumière,
Je dois reconstruire sur les ruines d’hier
En lavant par le sang les carreaux souterrains ;
Mais parfois… J’ai pitié de mon ombre amoureuse
Qui me rappelle que je vis sous le soleil
De moi-même, elle en est l’horloge précieuse,
Quand le signe se dresse au cadran du sommeil.

Alors, je garde des ruines pour que survive
Le temps, qui désire avant tout son mariage,
Qui désire sans limites les autres rives,
Pour poser sa couronne sur les autres âges…

Et les conquérir en vue d’un nouvel empire

Ce sont des vestiges qui soutiennent ma vie,
Les cariatides de la mort et du désir,
Elles s’embrassent, devant moi bien que j’ai envie,
Jalousement, de les fondre et les réunir,
Pour en faire un reine unique, au deux âmes
Qui m’évoquera dans une sublime flamme
Mes vestiges, les yeux perdus vers l’avenir…

VII- Septentrion

Te voir sous tes fourrures baltiques
A l’envers de ton océan figé
Me fait perdre ta présence à la faveur de ton être

Je me suis égaré dans ton giron
Où j’ai baigné mon corps illuminé par les neiges Lointaines
Comme pour un baptême je me suis laissé couler
Dans tes eaux profondes
J’en perd mon méridien

Dans les noirceurs de l’abîme je sens grandir en moi
Une ample respiration qui disloque les épaves
Et mon cœur se signe à la venue du léviathan
Il vient du nord pour avaler le soleil

Ça y est j’ai peur de naître

Naître en toi et me sentir gonfler d’écume
Naître en moi et sentir les souffles gigantesques des monstres marins
Naître en nous pour échouer aux limites du ciel
C’est comme mourir de soif au milieu de l’océan

Nous avons navigué à la faveur du vent
Des tempêtes et des typhons
Pour gagner les latitudes gelées où nous pourrons dormir en paix
Chaque jour nous nous évaporons plus
Chaque jour nous nous privons d’eau
Afin de la laisser à nos cercueils de neige

Il est loin le temps où un étang suffisait
Où tu venais me prendre pour troubler l’onde des mares
Après tant d’étés passés à brûler
Nous éprouvions la nécessité de l’hiver

Nous sommes partis et il y avait déjà plus de nuit que de jour
Par tes yeux l’on sentait les appels d’air qui font claquer les voiles

Aux premiers gels nous avons douté
Nos lèvres étaient de glace
Qui reflétaient nos baisers
Comme une infinie succession de miroirs
Il n’y avait plus rien à attendre

Je cherchais tes veines sous le velours du givre
Pour boire ton vin chaud
Mais tout s’était éteint
Endormi dans l’hiver éternel

Nous étions en effet l’un pour l’autre pour toujours
Comme deux statues immobiles
Sans même la force de murmurer le printemps

Mais il me reste encore un peu de sang
Que j’ai fais couler sur la neige en mémoire des roses
Et j’ai réalisé que je ne pouvais faire vivre mes sept étoiles
Dans une trinité prisonnière pour toujours d’une cathédrale neigeuse

Mon souffle se fit plus rapide
Et toute une flore païenne exalta mon corps transi
Je me souvins intensément du désir brûlant
Qui aurore les pays du nord

C’est pour cela que je suis parti
La fin ne m’intéresse guère
Et puisque c’est lui qui fait apparaître le monde
Je partirai à la conquête de la région la plus intime du soleil.
Aldébaran

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Poème en Phonétique

i a lekutə dy silɑ̃sə

dɑ̃ lə vɑ̃tʁə dy ʃao, lε ʁεvə seməve,
ʃεʁʃɑ̃ a la suʁsə pʁimitivə lœʁ mεʁə
ɑ̃sɔmεje, ki vit də sεz- ɑ̃fɑ̃ dy fləvə,
kuʁ də paʁɔlə sevapɔʁɑ̃ dɑ̃ lεz- εʁ.

lε nɥaʒə setɑ̃de, kuvʁɑ̃ lε ʁəflε,
lε dublə sevɔke dɑ̃ lə sjεl asɔ̃bʁi,
e dɑ̃ lε pʁəmjεʁə tʁɑ̃spaʁɑ̃sə də la nɥi
ʁənε lə lɑ̃ɡaʒə də sɔ̃ fʁεʁə mɥε,

lə mistεʁə ɑ̃fui maɲetizə lε pɑ̃se,
εllə ɡlise sɑ̃ sεsə, sɑ̃ pεʁdʁə la fasə
tutə kɔ̃vylse paʁ dεz- ynjɔ̃z- ɛ̃sɑ̃se,
ɑ̃tʁə amuʁ e-εnə e deziʁ… e sə ki pasə.

ɛ̃kjεtə, εllə ʃεʁʃe lə mo libeʁatœʁ,
la fʁazə ʃɑ̃tɑ̃tə, lə fø ɛ̃spiʁatœʁ,
εllə vive la dulœʁ dynə o ki sɑ̃flamə,
vivɑ̃ lεtʁə mεmə kɔmə œ̃ mɑ̃sɔ̃ʒə ɛ̃famə.

il syfiʁε dynə etɛ̃sεllə puʁ etɛ̃dʁə
la fεblə kʁesεllə də sεtə vwa sɑ̃ tɛ̃bʁə,
kɔmə kaʁuzεl sɑ̃ kulœʁ dœ̃ movε ʁεvə
pʁənɑ̃ avεk lɥi lεz- etwalə ki sə lεve,

il syfiʁε dynə ɔʁεzɔ̃ puʁ ɑ̃dɔʁmiʁ
lε lεtʁə- nεʁvøzə subljɑ̃ dɑ̃ dε mo,
e plεnə dɔʁɡœj sə ʁəfyze a muʁiʁ
puʁ ʁənεtʁə, sɛ̃bɔlik, o sjεl nuvo.

e puʁtɑ̃, sε tuʒuʁ vaɡəmɑ̃ misteʁjø
deklεʁsiʁ ynə vwa nuvεllmɑ̃ eklozə,
də luvʁiʁ, tɑ̃dʁəmɑ̃ sɑ̃z- alteʁe sa pʁozə,
pɥi la sεziʁ, sɑ̃ vjɔlɑ̃sə, o vəluʁ dεz- iø.

lε mo deɡaʒe ø mεmə dε paʁfœ̃
ɑ̃tεtɑ̃
e la pɑ̃se ɔʁfevʁe a lɔʁ fɛ̃
eleɡɑ̃
sə ʁədekuvʁə vivasə e sovaʒə
sa ʃεʁ ekʁitə a lɑ̃kʁə dεz- ɔʁaʒə
dy pʁɛ̃tɑ̃.

ji timidite
« εt sudɛ̃ tu sə fiʒə,
ʒə ʃasə lamə… » patʁisə də la tuʁ dy pɛ̃

sə sɔ̃ lε kɔ̃vεʁsasjɔ̃ sɑ̃ malvεʁsasjɔ̃
ni depʁedasjɔ̃ də no dø sitɥasjɔ̃,
kaʁ lεz- εspasəz- uvεʁz- ɑ̃tʁə no silabə
nu ɡide dɑ̃ lə sjεl kɔmə œ̃ ɡʁɑ̃t- astʁɔlabə.

dεz- εskisə ɡlise syʁ lεspasə lisə
e bʁijɑ̃ ki syʁplɔ̃bə dε bεze tʁε sɔ̃bʁə,
kuvʁɑ̃ la tenebʁøzə ɔʁiʒinə ɑ̃ lisə
avεk la tɑ̃tasjɔ̃ dœ̃n- evεj də penɔ̃bʁə.

pɑ̃dɑ̃ sə tɑ̃ la, lœvʁə də lamuʁ də swa
meditə œ̃ kɔ̃plo dɑ̃ lε kavεʁnə- dy mwa,
ʁəfyzɑ̃ də sə ʁəkœjiʁ dəvɑ̃ lidɔlə
edifje puʁ lə maʁjaʒə də no paʁɔlə.

εllə pʁetɑ̃ kə sə nε vʁεmɑ̃ pa sɔ̃n- afεʁə
kə də sɑ̃tʁətəniʁ ɑ̃ dəɔʁ də sa sfεʁə,
si lɔ̃ɡəmɑ̃ fɔʁʒe avεk monotɔni
afɛ̃ də sɑ̃dɔʁmiʁ dɑ̃ sε kɔsmɔɡɔni !

alɔʁ dɔʁɡœj, εllə sə dʁapə də syfizɑ̃sə,
sedɥizɑ̃tə e ʁəbεllə dɑ̃z- œ̃ vazə klo,
sεz- iø bεʁsøzə puʁ asupiʁ sa mefjɑ̃sə
la ʁəvεte dœ̃-alo də kɔkəliko…

tutə la flɔʁə də linɔsɑ̃sə febʁilə
sə ʁəpli alɔʁ dɑ̃ sɔ̃ silɑ̃sə pʁəmje
e kʁɛ̃ paʁ lε mo də sə ʁɑ̃dʁə vɔlatilə
kɔmə œ̃n- wazo kə lə ʃasœʁ tjɛ̃ ɑ̃ ʁεspε.

jji tenεbʁə
« tə sœ̃ is faʁ awε, εʃoz- ɑ̃d siʁkləs »
ylve

lwɛ̃ dɑ̃ noz- iø sə myʁmyʁe lε nɥi pase
a fɔʁʒe la lɥœʁ, supiʁɑ̃tə o papijɔ̃,
ki pεʁsiste dɑ̃ ta pʁynεllə ʁesase
paʁ no ʁəɡaʁd pεʁsistɑ̃z- ɑ̃ lœʁ flɔʁεzɔ̃.

pɥiskə ʒə dwa tə kite, kə mɔ̃ kɔʁ nə swa
kœ̃n- ɑ̃baʁkadεʁə dɑ̃z- œ̃ muʃwaʁ də swa,
aʒite paʁ lε ʁεvə ʁεstez- o ʁivaʒə
ki nu vive dɑ̃ la distɑ̃sə dœ̃ vizaʒə.

bʁεvə epinə də ʃεʁ

diʁə kə ʒə tεmə dɑ̃ lε kuʁɑ̃ kɔ̃tʁεʁə
mə plɔ̃ʒə dɑ̃z- œ̃n- ɔseɑ̃ ʁəkɔmɑ̃se
a ʃakə silabə dy sɑ̃ vɔlɔ̃tεʁə
ki sabimə o meʁidjɛ̃ də sɔ̃ kœʁ ɡlase,

kə diʁə dɑ̃ sε mɔmɑ̃ dεkstʁεmə detʁεsə ?
kɑ̃ lə ʁεvə nε kə lɑ̃plə ʁepetisjɔ̃
dœ̃ ʁəɡaʁ pεʁdy dɑ̃ lə mjɛ̃ e sε pʁɔmesə,
dœ̃n- amuʁ ki pʁɑ̃ laspε dynə pʁediksjɔ̃ ?

dɑ̃ la plεnə də nɥi ʒε kœji œ̃ nɥaʒə,
syʁ lε ʁəbɔʁd dœ̃ lak ʒε kœji ynə ʁozə,
e sεt- ɑ̃ kœjɑ̃ kə ʒε bati mɔ̃ lɑ̃ɡaʒə
ki ɡlanə lə ʁeεl ɑ̃ ʃapəlε də ʃozə.

ynə ʁəkεtə oz- etwalə sɑ̃blə ɛ̃pɔsiblə,
kɑ̃ ʒə paʁtaʒə mɔ̃ sεkʁε avεk la lynə
ki metamɔʁfozə mε paʁɔlə sɑ̃siblə,
kɔmə lɑ̃vεʁ lyminø dynə ekɔʁsə bʁynə,

ʒə sɑ̃s puʁtɑ̃ bjɛ̃ lə dezaʁwa dy deziʁ…
sε nɥi kə ʒə pasə puʁ tʁuve ynə ʁəmεdə
o mɑ̃tiʁ, ʒə vø lε dedje a tɔ̃ suʁiʁə
ki lεvə lə teatʁə kɑ̃ ʒapεllə a lεdə,

ʒə nə vø pa dɔʁεzɔ̃ fynεbʁə
kə nɔtʁə ʒwa ʃasə lε tenεbʁə.

iv lə fo klεʁ də lynə
« ɔmnja ʒam fje, fjəʁi ke pasə nəɡabam » viʁʒilə

dɑ̃ lə sjεl, il i a dεz- epavə də sɑ̃
a lœʁ u la lymjεʁə sə fɔ̃ dɑ̃ la nɥi,
e pɥi, dɑ̃ la plɥi imɔʁtεllə dy kuʃɑ̃
fləʁise no flœʁz- ɑ̃n- œ̃ bukε ɛ̃fini.

ʒə nε pa la kle sɔ̃bʁə
dy mistεʁə dε fo klεʁ də lynə
u lə deziʁ sə kʁwa kɔ̃plε
alɔʁ kil ε paʁ twa, o sɔmε də sε metamɔʁfozə
etʁɑ̃ʒə…

ʒə mə sɑ̃s kɔmə œ̃ mɔ̃stʁə εɡzalte
paʁ œ̃n- œj ʁuʒə ki kɔ̃pʁimə ma pwatʁinə,
e a lɔʁe dy bwa, tʁε pʁoʃə də twa, ʒesεj də mɔʁdʁə
kaʁ ʒə vø pεʁdyʁe ɛ̃si o sɔmε də ma lymjεʁə,
e ʒə vø maʁke ta po paʁ ynə vjɔlɑ̃sə
ki na puʁtɑ̃ ʁjɛ̃ dɛ̃kjetɑ̃,
sε la vjɔlɑ̃sə dœ̃n- εtʁə sytyʁe a ynə pʁɔmεsə kil nə kɔnε pa.
il epʁuvə ɛ̃tɑ̃semɑ̃
lε pwɛ̃.

il fodʁa puʁtɑ̃ ʁuvʁiʁ lε plε
puʁ siɲe dotʁə- paktə də sɑ̃,
ki sɑ̃ vɔ̃ valse avεk lə tɑ̃ də noz- absɑ̃sə,
e lə vjɔlɔ̃ də noz- εspasə ʒuəʁa dɑ̃plə vaʁjasjɔ̃
syʁ la blesyʁə,
sεllə kɔ̃n- εmə e ki sə deklinə puʁ kə lɔ̃n- apʁesi mjø
nɔtʁə ʁeεllə pʁezɑ̃sə lœ̃n- a lotʁə,
la pʁezɑ̃sə ki bʁylə tɑ̃ εllə siɲə la veʁite də nɔtʁə ʃεʁ…

o sɔmε də no lymjεʁə,
a lɔʁe də nɔtʁə œj ʁuʒə dɑ̃ lə swaʁ,
ʁəflε dε sɔlεjz- ɑ̃ pεʁpetɥεllə ʁezyʁεksjɔ̃,
nu ʁəfyzɔ̃ letεʁnite kə pʁɔmεte
lε fo klεʁ də lynə.

ve lə kɔʁ saʒə
« (… ) il ɔbliʒə ɛ̃si o ʁevεj dε ʁeʒjɔ̃ də kɔ̃sjɑ̃sə ɔpskyʁsjəs ».
miʃεl bytɔʁ

lɛ̃pɑ̃se εt- ynə dulœʁ nesesεʁə
puʁ kə la paʁɔlə nə məʁ pa də livεʁ,
ki ɡʁɑ̃di ɑ̃tʁə lε silɑ̃sə planetεʁə,
dε mo ki vəle semɑ̃sipe də la ʃεʁ
puʁ ale vεʁ twa.

tutə paʁɔlə ʁəsɑ̃blə a ynə kɔ̃kεtə,
a œ̃ ləve də ʒuʁ syʁ la nεʒə dy ʁεvə,
œ̃ sɔlεj ki ba la məzyʁə dε tʁo bʁεvə
paʁtisjɔ̃z- ɛ̃timə, də no kœʁ ki klikεte,

εllə mə mɑ̃kə la paʁɔlə ʃodə dy suflə,
kɔmə œ̃ vɑ̃ ki vjɛ̃dʁε dajœʁ, ɑ̃kɔʁə lwɛ̃tɛ̃,
dœ̃ kɔʁ si efʁεje kɔ̃ lubli dɑ̃ lεz- ulə
dε ɡeʁəz- ɔseanə, dynə amə o matɛ̃
dεllə mεmə, ʃεʁʃɑ̃ a vɛ̃kʁə sε limitə,
sɑ̃ savwaʁ kə sε la ʃεʁ e lə sɑ̃ ki lɛ̃vite.

lə kɔʁz- εt- ynə lwa kepʁuvə lə lɑ̃ɡaʒə,
il sε kil ε lə familje, lamɑ̃ tʁɑ̃zi
dœ̃ vastə dɔmεnə u sε suvəniʁ sɑ̃ɡaʒe,
fεʁtilizɑ̃ la teʁə dœ̃ mɔ̃də ɑ̃dɔʁmi,

e ma pɑ̃se dəmɑ̃də sa mɛ̃ a mɔ̃ kɔʁ,
kil nə swa plys kœ̃ ʁəlikεʁə diskʁε,
mε lə fwaje ʃaləʁø dε mo ki soʁɔʁe
o nɥaʒə puʁpʁə- dy sɑ̃, a mɔ̃ ʃəvε,

lɛ̃pɑ̃se εt- ynə dublyʁə dy deziʁ
ynə ɔpskyʁite ki devwalə lεz- etwalə

vi vεstiʒə
« ləs œʁ sɑ̃n- alε tʁε lɑ̃tə,
œ̃ swaʁ də bʁymə, œ̃ swaʁ divεʁ,
œ̃ swaʁ də mɔʁz- e dabsɑ̃tə,
u lɔ̃ ʁεvə o ʁεvə djəʁ ».
ʁemi də ɡuʁmɔ̃

kɔmə puʁ mɑ̃pεʃe də lə diʁə a nuvo,
lε kɔlεʁəz- ɑ̃sjεnə sə ʃɑ̃ʒe ɑ̃ myʁmyʁə
dusəʁø dɑ̃ lœʁz- ɑ̃plə mɑ̃to də fuʁʁyʁə,
pɥiz- εlləz- œʁte ɑ̃ silɑ̃sə mε kœʁz- ɑ̃sεstʁo.
il dɑ̃se kɔmə lε planεtə dynə vutə
ki ε la mjεnə kɑ̃ ʒə mə dɔʁə a la lynə,
ɑ̃bʁasɑ̃ lε fazə puʁ mɔ̃ kɔʁ ki ekutə,
puʁ ʁəʒwɛ̃dʁə lε suvəniʁ də ma laɡynə.

ʒə dwa kɔ̃tinɥe ɑ̃ mwa kɔmə œ̃n- asasɛ̃,
tʁakɑ̃ lεz- ɔ̃bʁə- də mɔ̃ kuto də lymjεʁə,
ʒə dwa ʁəkɔ̃stʁɥiʁə syʁ lε ʁɥinə djεʁ
ɑ̃ lavɑ̃ paʁ lə sɑ̃ lε kaʁo suteʁɛ̃,
mε paʁfwa… ʒε pitje də mɔ̃n- ɔ̃bʁə amuʁøzə
ki mə ʁapεllə kə ʒə vis su lə sɔlεj
də mwa mεmə, εllə ɑ̃n- ε lɔʁlɔʒə pʁesjøzə,
kɑ̃ lə siɲə sə dʁεsə o kadʁɑ̃ dy sɔmεj.

alɔʁ, ʒə ɡaʁdə dε ʁɥinə puʁ kə syʁvivə
lə tɑ̃, ki deziʁə avɑ̃ tu sɔ̃ maʁjaʒə,
ki deziʁə sɑ̃ limitə lεz- otʁə- ʁivə,
puʁ poze sa kuʁɔnə syʁ lεz- otʁəz- aʒə…

e lε kɔ̃keʁiʁ ɑ̃ vɥ dœ̃ nuvεl ɑ̃piʁə

sə sɔ̃ dε vεstiʒə ki sutjεne ma vi,
lε kaʁjatidə də la mɔʁ e dy deziʁ,
εllə sɑ̃bʁase, dəvɑ̃ mwa bjɛ̃ kə ʒε ɑ̃vi,
ʒaluzəmɑ̃, də lε fɔ̃dʁə e lε ʁeyniʁ,
puʁ ɑ̃ fεʁə œ̃ ʁεnə ynikə, o døz- amə
ki mevɔkəʁa dɑ̃z- ynə syblimə flamə
mε vεstiʒə, lεz- iø pεʁdys vεʁ lavəniʁ…

vji sεptɑ̃tʁjɔ̃

tə vwaʁ su tε fuʁʁyʁə baltik
a lɑ̃vεʁ də tɔ̃n- ɔseɑ̃ fiʒe
mə fε pεʁdʁə ta pʁezɑ̃sə a la favœʁ də tɔ̃n- εtʁə

ʒə mə sɥiz- eɡaʁe dɑ̃ tɔ̃ ʒiʁɔ̃
u ʒε bεɲe mɔ̃ kɔʁz- ilymine paʁ lε nεʒə lwɛ̃tεnə
kɔmə puʁ œ̃ batεmə ʒə mə sɥi lεse kule
dɑ̃ tεz- o pʁɔfɔ̃də
ʒɑ̃ pεʁ mɔ̃ meʁidjɛ̃

dɑ̃ lε nwaʁsœʁ də labimə ʒə sɑ̃s ɡʁɑ̃diʁ ɑ̃ mwa
ynə ɑ̃plə ʁεspiʁasjɔ̃ ki dislɔkə lεz- epavə
e mɔ̃ kœʁ sə siɲə a la vənɥ dy levjatɑ̃
il vjɛ̃ dy nɔʁ puʁ avale lə sɔlεj

sa i ε ʒε pœʁ də nεtʁə

nεtʁə ɑ̃ twa e mə sɑ̃tiʁ ɡɔ̃fle dekymə
nεtʁə ɑ̃ mwa e sɑ̃tiʁ lε suflə ʒiɡɑ̃tεsk dε mɔ̃stʁə- maʁɛ̃
nεtʁə ɑ̃ nu puʁ eʃue o limitə dy sjεl
sε kɔmə muʁiʁ də swaf o miljø də lɔseɑ̃

nuz- avɔ̃ naviɡe a la favœʁ dy vɑ̃
dε tɑ̃pεtəz- e dε tifɔ̃
puʁ ɡaɲe lε latitydə ʒəlez- u nu puʁʁɔ̃ dɔʁmiʁ ɑ̃ pε
ʃakə ʒuʁ nu nuz- evapɔʁɔ̃ plys
ʃakə ʒuʁ nu nu pʁivɔ̃ do
afɛ̃ də la lεse a no sεʁkɥεj də nεʒə

il ε lwɛ̃ lə tɑ̃z- u œ̃n- etɑ̃ɡ syfizε
u ty vənε mə pʁɑ̃dʁə puʁ tʁuble lɔ̃də dε maʁə
apʁε tɑ̃ dete pasez- a bʁyle
nuz- epʁuvjɔ̃ la nesesite də livεʁ

nu sɔmə paʁtiz- e il i avε deʒa plys də nɥi kə də ʒuʁ
paʁ tεz- iø lɔ̃ sɑ̃tε lεz- apεl dεʁ ki fɔ̃ klake lε vwalə

o pʁəmje ʒεl nuz- avɔ̃ dute
no lεvʁəz- etε də ɡlasə
ki ʁəfletε no bεze
kɔmə ynə ɛ̃fini syksesjɔ̃ də miʁwaʁ
il ni avε plys ʁjɛ̃ a atɑ̃dʁə

ʒə ʃεʁʃε tε vεnə su lə vəluʁ dy ʒivʁə
puʁ bwaʁə tɔ̃ vɛ̃ ʃo
mε tu setε etɛ̃
ɑ̃dɔʁmi dɑ̃ livεʁ etεʁnεl

nuz- esjɔ̃z- ɑ̃n- efε lœ̃ puʁ lotʁə puʁ tuʒuʁ
kɔmə dø statɥz- imɔbilə
sɑ̃ mεmə la fɔʁsə də myʁmyʁe lə pʁɛ̃tɑ̃

mεz- il mə ʁεstə ɑ̃kɔʁə œ̃ pø də sɑ̃
kə ʒε fε kule syʁ la nεʒə ɑ̃ memwaʁə dε ʁozə
e ʒε ʁealize kə ʒə nə puvε fεʁə vivʁə mε sεt etwalə
dɑ̃z- ynə tʁinite pʁizɔnjεʁə puʁ tuʒuʁ dynə katedʁalə nεʒøzə

mɔ̃ suflə sə fi plys ʁapidə
e tutə ynə flɔʁə pajεnə εɡzalta mɔ̃ kɔʁ tʁɑ̃zi
ʒə mə suvɛ̃z- ɛ̃tɑ̃semɑ̃ dy deziʁ bʁylɑ̃
ki oʁɔʁə lε pεi dy nɔʁ

sε puʁ səla kə ʒə sɥi paʁti
la fɛ̃ nə mɛ̃teʁεsə ɡεʁə
e pɥiskə sε lɥi ki fε apaʁεtʁə lə mɔ̃də
ʒə paʁtiʁε a la kɔ̃kεtə də la ʁeʒjɔ̃ la plysz- ɛ̃timə dy sɔlεj.