Poème:L’enfant Rameur

Allongée sur un vieux matelas dans une chambre noir,
Je pose mes petites mains sous ma tête pour dormir,
Somnolant sur la solitude tardivement chaque soir,
J’éveille mon âme enfantine à l’orée de mes blessures.

Dans l’eau froide de la matinée se congèlent mes doigts,
Quand je rince le lessive dans le silence de l’aube,
Sans me plaindre de ce vide, car j’en ai pas le droit,
Je sèche la sueur sur mon front par un bout de ma robe.

Je balaye les feuilles mortes dans ce jardin morose,
Qui périt soir après soir pour s’endormir dans la froideur,
Le vent se déchaîne emportant les restes des fleurs roses,
Et disperser ces morceaux déchirés sur mes douleurs.

Je rame durement ma tendre enfance depuis mes dix ans,
Dans mes mains un grand sceau au lieu d’un petit jouet,
Ma vie soupir sa détresse sur mon corps d’enfant,
Pour laisser sur ma peau fragile les traces du fouet.

J’essuie les vitres de la fenêtre chaque jour en silence,
Regardant les élèves avec leurs cartables s’accourir à l’école,
Je ferme mes yeux pour y cacher les lueurs de l’ignorance,
Et sous mes mèches s’enfouissent des larmes qui me consolent.

Accroupie dans un coin de la cuisine, les jambes endolories,
J’attends des ordres, des plaintes, ou un petit bout de pain,
J’entrevois la famille qui se fête joyeusement cette nuit,
Et je m’abandonne alors au sommeil pour calmer les maux de ma faim.