Poème:Le Rideau

Tu es là, debout,
Tu fais le beau !
Ta tête doublée en renfort,
Ornée de douze cravates pincées.
Te donne l’image d’un seigneur.
Tes ourlets à la main cousus.
Tes larges remplis bas
A la vapeur, repassés,
Tes plis, ondulés et uniformes
Se succédant en harmonie
Font rêver les amateurs.
Tu es là, debout,
Tu dévoiles ton trésor,
A chaque personne qui passait.
Tes deux embrasses jumelles
T’enlacent avec tendresse
D’une étreinte douce et éternelle,
La beauté de tes couleurs.
Et ton joli bleu fond de mer
Laisse apparaître tes feuilles,
Dans un camaïeu de verts
Tu es là, debout,
Une star sous les lumières.
Ta grandeur et ton allure,
De peur de faire des jalouses,
Cachent sur ton envers,
Une majestueuse doublure,
Ni la légèreté des voilages.
Ni les vitrages tendus.
Ni les vieilles tentures.
Aux tringles pendues,
N’égalent ta splendeur.
Tu es là, debout,
Tu fais le charmeur !
Sous les yeux de ce fauteuil,
Bourré de crin et de ressorts,
Qui regrette son pauvre destin,
De vivre aux pieds du seigneur
Et pleure son mauvais sort.
D’être un jour nommé Bergère.
Et pourtant, malgré ton charme,
Façonné par deux stagiaires,
Une Lyse et un Mahieddine,
Dans un tissu bas de gamme,
Sous le regard de Marianne,
Tu ne vaux pas aussi cher
Qu’un torchon de cuisine.