Prose:Le Magistrat Et Le Manant (Hommage À Jean De La Fontaine)

Un jour un magistrat, forçat d’abnégation,
Militant de toujours aux louables intentions,
Arriva au sommet, et s’y trouva fort bien.
Un manant l’harangua, du fond de son pétrin.

« Sauvez mes compagnons, Aimez nos indigents !
Une bande de coquins, aimant mener bon train,
Pour masquer ses méfaits, à la rue les envoie.
De fourbir nos épées, nous n’avons d’autre choix.

Les drames n’ont qu’une vertu, offrir motivation,
Dénoncer il faut bien, pour faire prévention.
Et si l’inéluctable, à notre porte tape,
Invitons les coupables, afin qu’ils fassent étape.

Si le foyer s’effondre, et qu’ils s’y trouvent occis,
Pour le prix de la fronde, l’exemple nous suffit.
Les manants aux menaces, préfèrent les promesses.
Sachez qu’ils sont tenaces et aptes à la prouesse.

La République est belle, mais Dieu qu’elle fait peine,
Quand des deniers publics, d’impudiques font aubaine.
Pour ceux qui la trahisse, elle agit comme une reine.
Elle applique sa Justice et leur fait perdre haleine.

On la dit non-voyante, c’est ce qui la fait lente,
Elle marche tâtonnante, mais les mains vigilantes.
Une fois sous son emprise, les coupables elle éreinte.
Même s’il y a méprise, violente est son étreinte. »

Le magistrat prudent, un devis effectua.
S’il comptait nombres amis, des ennemis avait tas.
Les manants sont nombreux, aimés les indigents.
Le peuple est avec eux, cela est inquiétant.

L’auguste magistrat tira sa conclusion :
« Au diable les félons, qui m’entrainent par le fond.
En guise de raison, il chante mon oraison.
De cette vilaine farce, qui sera le dindon ?

La masse oublie tout sauf histoires de sous,
Aux faibles destinés, dévoyés par à-coups.
Mieux vaut logis garder et emplois préserver,
Éloigner les soucis et amis conserver. »

Aux enfants laissons donc les fables et les sornettes
Et prenons pour acompte une vérité bien faite.
Le peuple peut tout faire, sauf pardonner l’affront.
Trop de provocations le mènera au front.