Poème:Émilie

Émilie marche sur les bords du canal. Elle pense à Erwan qui comme toujours ne l’a pas remarqué. Pourtant elle a tout tenté pour qu’il la remarque, enfin tout ce qu’elle était capable de tenter. Chaque fois q’il passait près delle, elle le regardait sans détacher son regard, dans l’espoir qu’il pose ses yeux sur elle. Ce ne devait pas être la bonne technique. Émilie ne mange plus depuis un mois, chaque repas est un supplice, chaque bouchée veut ressortir à tout prix de sa gorge nouée, alors elle va vomir. En un mois, Émilie a perdue 10kg, passant de poids plume… à rien du tout comme aurait dit son père ex-boxeur avec qui elle vit, sans sa mère, morte il y a un an d’un cancer. Son père qui ne parle plus que de boxe depuis ce jour, ignore completement sa fille : il aurait préféré un fils. Émilie ne dors plus non plus, et chaque seconde volée à son sommeil l’oblige à penser à Erwan. C’est une obsession. Depuis qu’Erwan l’a aidée le jour où elle s’était blessé, au volley. Pour lui, c’était normal, il aurait fait la même chose avec n’importe qui ; pour elle, s’était la première fois que quelqun s’inquiètait pour sa personne. Émilie passe devant les magasins longeant le canal, elle se regarde à travers la vitrine refletant son image. Elle aurait aimé être jolie. Juste pour Erwan, pour qu’il la voit, pour qu’il l’aime et pour qu’il puisse être fier de celle qu’il aime. Mais Erwan ne l’aimera jamais : Sous ses yeux verts, de longues cernes violacées s’étalent marquant sa maigreur encore plus, ses joues sont creusées, ses cheveux raides ne sont pas coiffés pour cacher son visage et sa maigreur. Ses bras : des brindilles capables de craquer au moindre choc. Elle est pale et squelettique. Et en plus, elle est seule. De son porte feuille tombe une photo : elle et Jane son ex-meilleure amie, d’avant sa « maladie » comme disait l’infirmière du lycée. Jane l’avait laissé tombé depuis qu’elle avait changé, physiquement et mentalement ne pensant plus qu’à la mort. Sur cette photo elle ne reconnait pas la jeune fille qui est devant elle dans la vitrine. Elle voit une fille souriante, avec de bonnes joues roses, un sourire large allant quasiment d’une oreille à l’autre, des grands yeux pétillants en amandes, les cheveux ondulés tombant en cascade sur son visage : elle se trouve jolie. Alors elle comprend que si elle veut qu’on l’aime, si elle veut qu’Erwan l’aime il faut changer, redevenir cette jeune fille. Puis elle sourit, elle a perdu l’habitude ses lèvres tremblent mais elle réussit à sourire quand même, à rire même ce qui la fait sursauter. Et elle s’en va rêveuse, elle a décider se s’aimer.