Prose:Méditation Sur La Nouvelle Guerre De Trente Ans

C’est encore l’hiver —
sur les plaines, sur les âmes,
sur les cartes tremblantes dans la lumière bleue des écrans.

Le monde retient son souffle,
entre deux détonations,
entre deux silences trop lourds.

On dit : c’est la guerre.
Mais elle dure déjà si longtemps
qu’elle a pris la forme de nos pensées,
la couleur de nos rêves,
le goût amer de nos matins.

Autrefois, on brûlait pour la foi,
aujourd’hui pour la fierté,
et les cendres sont les mêmes :
mères devant des portes sans retour,
enfants qui craignent le bruit du silence.

La guerre ne marche plus dans les tranchées :
elle circule dans nos mots,
dans nos écrans,
dans nos regards fatigués.

Elle habite nos conversations,
nos certitudes,
nos lassitudes.

Et pourtant —
dans la fumée des villes,
dans la cendre tiède des prières,
quelque chose demeure, minuscule et vivant :
un germe sous le givre,
un murmure sous le vent.

Peut-être est-ce la raison
qui cherche encore racine.
Peut-être la bonté,
qui se souvient de parler.
Peut-être la mémoire,
non plus comme blessure,
mais comme semence.

Car si ce siècle
ne doit pas devenir un autre trente ans de nuit,
ce sera parce qu’un seul être,
quelque part,
aura commencé —
dans le secret —
à faire la paix.