Chanson:Depuis Ce Soir-Là

Maudit lieu soit-il !
Les enfants naissent lions en cage,
Et finissent moutons dépourvu de rage.
Je suis née Loup,
Sans jamais m’être dissuadée des barreaux,
J’étais la grande solitaire de la cour ;
Infidèle aux ragots,
Tant ils spasment mes boyaux.
Je ne parlais jamais à grand monde,
Un autre m’attendait aux côtés de Grand arbre.
J’étais la grande louve,
Qui aurait pu s’affamer d’insultes ;
Mais qui finissait toujours,
Par contempler les moutons.
Si l’unanimité ne fait pas la vérité,
Pourquoi délaisser le seul élève,
Dont le savoir ne provient de sombres cahiers ?
Si la vie est rude,
Et que les pleurs ne mènent à rien,
Pourquoi m’avoir laissé m’assécher sur ce chemin ?
Depuis ce soir-là,
L’encre de mes cahiers
M’eût paru encore plus noire que jamais.

J’aimais le crépuscule.
Et chaque soirée, je priais ;
Pour qu’un beau jour,
Le soleil ne se lève plus jamais.
Je vidais ces litres de larmes la nuit,
En espérant délivrer ces nerfs
Qui se rompent au fil des journées.
Une souffrance en solitaire,
Que je m’apprêtais à affronter.
Au coin du lit,
Un petit ange aux billes vertes,
Cache ses joyaux dans un paquet de stylo
Déguisé en clown…

Ces 8 heures de cours
Me parurent une éternité.
Avec lui, des rêves…
Que chaque nuit je manquais.
Ici, la fatigue est interdite ;
Si votre tête s’écroule sur vos écrits,
C’est sûrement signe d’une maladie ;
Si personne n’ose se décrocher la mâchoire,
C’est peut-être qu’ils ont peur de se la refiler…
Mais vous l’avez tous !
Avec tout ce que vous lui avez craché,
Sur cette maudite école !

Depuis ce soir-là,
Je laisse l’odeur de l’ange s’emparer de moi.
Je suis vidée d’un corps,
Qui ne semble plus être le mien.
Je patienterais, et le destin n’a qu’à s’en préoccuper !
Dans ma trousse,
Un trésor à déterrer…
Une moustache qui ne pesait rien,
Hélas, lourde de présence,
Elle savait se faire entendre !
La vérité me brûla les yeux,
Me voilà bénie d’essentiel.
La sonnerie retentit,
C’était bel et bien la dernière.
Je me levais, sans sourire, sans spasmes,
Tel un somnambule,
Qui savait déjà où se trouvait le chemin.

Je suis partie,
Sans le poids des adieux,
Et depuis ce soir-là,
Les élèves ne connaîtront la triste vérité ;
Mais sauront toujours verser un reste de larmes,
Bénies d’humanité.