Prose:…

Elle se dressait là, imposante et pourtant si fragile. Le vent emportait fougueusement ses cheveux et ses vêtements longs. Elle paraissait si solide, résistant sans aucun effort apparent, à ce vent si brusque… Mais ce n’en était pas le cas, elle souffrait, beaucoup. Son visage décomposé par les torrents de larmes qui coulaient était si pâle mais si sombre à la fois. Depuis combien de temps n’avait-elle pas dormi ? Nul ne saurait jamais le dire mais sûrement depuis bien longtemps et si elle dormait, qui pouvait assurer sans aucun doute qu’elle ne faisait aucun cauchemar et qu’elle dormait bien ? Personne…
Et puis, pour compléter ce si magnifique tableau bien que si sombre, la pluie vint s’ajouter au vent mais elle ne bougeait pas, elle restait là, figée comme une statue par le temps. Le ciel, comme tourmenté par cette jeune fille, était d’un gris effrayant, qui n’augurait rien de bon. Et cette jeune fille, personne ne savait qui elle était. Peut-être s’était-elle perdue, peut-être était-elle venue ici par erreur ou justement parce qu’elle le souhaitait. Mais seule elle le savait et personne n’osait l’approcher, le lui demander. Mais de toute façon, il n’y avait pas un chat ici, qui oserait s’aventurer dans un cimetière par un temps pareil, à part elle… ? Personne, encore une fois…
Mais qui pouvait bien tourmenter à un tel point cet être qui était si fragile ? Quels souvenirs gardait-elle de çà ? Personne ne le lui demandait, de toute façon, qui pourrait bien se préoccuper de ce que ressentait une jeune fille complètement affolée qui tentait de ne rien laisser paraître… Si solide et imposante et pourtant si fragile et cassable… Les souvenirs la tourmentent, personne ne le voit, elle pleure et souffre, en silence, comme toujours…
Mais chaque chose a une fin, chaque chose a une défaillance… Elle finit par tomber, tomber à genoux, devant une tombe SA tombe. La pierre qui li est destinée, SA pierre tombale, autant de pierres dans ce cimetière que de larmes tombées devant SA tombe, mais pourquoi cette souffrance après autant de pleurs, pourquoi ?
Les larmes coulent sur ses pommettes saillantes et leur course finit sur la pierre tombale, ajoutant à la pluie un autre liquide plus salé… Des mains pâles se posent sur la pierre glaciale et en sauvegardent une petite partie de la pluie et des larmes. La tête penchée sur les fleurs noyées par la pluie, les larmes redoublent d’intensité et ne s’arrêtent pas de couler…
La pluie ne cesse, tout comme ces larmes si amèrement lâchées. Comment faire pour oublier, pour oublier tout ce qu’il y a ? Car c’est bien à cause des souvenirs qu’elle est là, à cause de ces souvenirs si douloureux, trop douloureux. Son dos était soulevé par des sanglots plus forts les uns que les autres. Elle finit par poser son front contre la pierre glaciale et trempée. Ses cheveux retombèrent également dessus et s’imprégnèrent d’eau, de la pluie. Le jour baissa, les ténèbres envahirent cet environnement si hostile mais bien plus accueillant qu’une plaine déserte. Des ombres voyagèrent partout et le vent redoubla d’intensité mais la pluie s’arrêta, finit enfin de doucher tous les êtres vivants ou non qui se trouvaient dehors. Il y eu un bruit sourd et la silhouette arrondie se retrouva allongée, face contre terre, contre pierre, pierre tombale…
Cette jeune fille était mouillée jusqu’aux os mais ne bougeait plus, était-elle partie ? Partie rejoindre cet être si cher à ses yeux ? Pourtant, sa poitrine se soulevait toujours régulièrement mais, quelques instants plus tard, les soulèvements se firent soubresauts et bientôt, s’arrêtèrent pour laisser place à un très fin souffle qui prit, lui aussi, fin. Maintenant, à part les feuilles et fleurs soulevées par le vent, plus rien ne bougeait. Un voile de sérénité avait recouvert le cimetière, mais pour combien de temps… ?