Poème:Ange Faucheur

Je le sais
Je le sens
Je n’y échapperai pas
Alors, silencieux,
Je la contemple
Elle s’approche de moi

Debout, stoïque, face au monde
Je regarde sans un mot, je sonde
Les vallées de mousse, les montagnes sombres
Majestueux champs de guerre atroces,
Terrain de chasse, cimetière, palais de noces

La brume cavalant jusqu’en bas des collines mouillées
Fait se déverser, sur l’herbe désormais souillée
Une armée de cavaliers fantomatiques
À la fois répugnante et absolument fantastique

Tandis que mes yeux plongent dans ceux des formes squelettiques,
Ma vie est dépourvue de sens et j’entends une douce musique

Une mélodie divine composée par les démons
Jouée par le brouillard omniprésent, m’arrachant de toute appréhension

Derrière les draps opaques de vapeur,
Une silhouette se dessine, me délivrant de la peur
Je vois une forme rassurante, Une noire déesse enveloppée de blanc
Venant des enfers eux-mêmes, remontée en un instant

Déchue, bien sûr, elle l’est toujours,
Seulement, pour m’emmener avec elle, elle a dû faire un détour
Je suis privilégié, ça n’arrive qu’une seule fois
Pour m’envoler loin de ce monde, il n’y a plus que quelques pas

La mort m’a surpris, à l’occasion d’une simple marche
Je me sens effrayé, peut être un peu lâche
Seulement, une contradiction frappante me fait horreur
J’ai l’impression de pouvoir toucher le bonheur
Elle devient alors plus claire que jamais et je ne peux que l’accepter
Je dois abattre l’illusion, la délivrance est déjà arrivée

Je ne suis rien face à son armée inébranlable
Soldats et généraux vont pouvoir se mettre à table
Mon sort est jeté, mes genoux sont tombés
Sa venue n’est qu’un indolore cap de souffrance à passer

Mon cœur bat frénétiquement,
Ça n’est pas de la peur,
C’est un soulagement.

≈2019
Repris en 2020