Prose:Portrait Au Vitriol

Ils veulent des visages sans âge,
Des peaux tendues comme des parchemins neufs,
Des lèvres gonflées à l’hélium du désir,
Des pommettes qui défient la gravité… … et le bon sens.

On ne sourit plus, on s’étire.
On ne vieillit plus, on se retouche.
Le miroir n’est plus un confident,
C’est un juge cruel, un chirurgien muet.

Les ongles ? Des sabres miniatures,
Gratte-toi l’œil, et tu signes ton testament.
Les sourcils ? Migrés vers la stratosphère.
Et les joues ? Sculptées comme des falaises de silicone.

Les seins ? Deux projectiles bien arrimés,
Prêts à défier la loi de Newton en toute circonstance.
Ils ne bougent plus, ils pointent…
Vers l’avenir, vers le ciel, vers le ridicule.

Les fesses ? Rembourrées comme des fauteuils de salon,
On dirait qu’elles attendent qu’on s’y asseye pour une conférence.
Mais gare à l’illusion : une chute, et c’est la mousse qui s’échappe.
On ne danse plus, on rebondit.

On ne ressemble plus à soi,
Mais à une version filtrée, lissée, photoshopée,
Un croisement entre une poupée et un pneu Michelin.
Et pourtant, on applaudit… car c’est tendance.

Et pendant ce temps,
Les corps ronds sont moqués,
Les rides sont effacées comme des fautes,
Les âges sont cachés comme des secrets honteux.

Mais moi, je dis :
Que la peau plisse, que le ventre danse,
Que les années s’affichent comme des médailles.
Car la vraie beauté, c’est celle qui ose exister
Sans bistouri, sans filtre, sans excuse.