Poème:Le Sein

J’étais sur une rout’ sombre
C’était un soir d’hiver,
Je suivais seulement mon ombre,
Je n’savais pas quoi faire.
Je regardais mes pieds, courbé
La tête baissée.

Soudain, je levai les yeux
Au loin ils semblaient être deux.
D’autres lumières oscillaient.
J’aurais parié, mon Dieu
Que ça venait des cieux.

Ma tête se mit à tourner,
Mon regard se troublait.
D’une sorte de ballon vaporeux,
Une jeune femme en sortait,
Me fixant dans les yeux.

A ce moment dans un halo, s’alluma un grand feu.
Des hommes apparurent me faisant signe de venir vers eux.
J’entendais comme des voix dans un long couloir.
C’était très lumineux, quand même un peu bizarre.

Il me sembla soudain entendre un son de cloche,
Puis ensemble autour de moi plusieurs femmes me chuchotent :
« Bienvenue dans notre vaisseau, déjà vous nous connaissez,
Tous les ans à la même date, vous savez nous trouver ».
L’une s’avance et me dit qu’elle s’appelle double zéro.
Je l’avais reconnue, l’an passé j’avais été son héros !

S’il vous plaît, lui demandai-je, je voudrais un verre de vin.
Mais voyons, vous le savez bien, on n’en a plus depuis l’an quatre vingt.
Puis il y eut d’autres jeunes femmes dans le couloir de l’entrée.
« Si vous voulez leur faire une surprise, amenez donc vos amis !
Cet endroit est pour eux, réservé à tous les plaisirs !
Il y a du champagne frais rosé, prenez en autant que vous voudrez !
Nous sommes faits pour vous recevoir et vous, pour vous amuser !

Il y a des miroirs partout, il y a en a même
Qui sont collés aux plafonds.
Quand on s’y réfléchit, ça donne une drôle d’illusion.
Soudain, j’eus un éclair dans les yeux :
Ah oui, ça y est, ça me revient,
On était partis loin, très très loin,
On était partis longtemps, très longtemps.
On était dans les cieux et qu’est ce c’était bien !

Je commençais à ne plus trop y voir, à cause de toute cette fumée.
Je me sentais bizarre. C’était comme si je volais.
Je ne voyais plus mes pieds et mon corps m’échappait…

La dernière chose dont je me souvienne
C’est d’la fin du festin.
Mais, c’est étrange, j’avais encore faim.
Je n’avais vraiment pas l’impression d’avoir mangé.
Avais-je été drogué ?
Double zéro revint vers moi et me dit :
» Nous sommes ici pour vous recevoir, vous le savez,
Alors restez ! De toutes façons vous ne pouvez plus nous échapper
Mais jamais, oh non jamais, votre terre vous ne la reverrez ! "
En effet, je l’aperçois, bleue, de plus en plus loin,
Et je n’ai plus la notion du temps.

Je suis comme dans une glacière, j’ai de plus en plus froid.
Puis lentement je m’endors.
Je ne me souviens plus de rien.
Je sens que je repars loin
Très très loin
Et je me sens libre
Comme délivré…