Poème:La Maison Bleue

Quand je descendais la rue de Bellevue
Nous avions de loin une vue
Sur la boutique du petit cordonnier
Celui qui patiemment réparait nos souliers

Flanqué de quelques copains
On refaisait le monde
On parlait de tout et de rien
De tout ce qui nous touchait à la ronde

On le refaisait au goût de l’Amérique
On s’en foutait du fric
On n’en avait pas mais peu importait
Au loin on entendait le port de Rouen vibrer

La maison bleue du cordonnier
C’était le rendez vous des copains
Et du premier au dernier
On était prêts à se damner

Pour une fille à fréquenter
Années soixante c’est ainsi que l’on parlait
On n’avait rien mais on s’en contentait
Faut dire que du boulot il y en avait

Tu quittais un patron le vendredi
Tu en avais un autre le lundi
Pour quelques centimes de plus
L’affaire était conclue

Les trente glorieuses
Comme elle étaient précieuses
On n’était pas avares de sentiments
Ce n’était pas comme maintenant

C’était chouette et gomina
On était le roi de la mob
C’était le temps des snobs
Et des fils à papa

On nous appelait les blousons noirs
De la maison bleue
Nous ne connaissions jamais le cafard
Ou alors si peu…