Poème:Post Morten (1)

C’est stipulé, le conseil municipal sur décision du nouveau maire met fin aux concessions à perpétuité
Les tombes abandonnées dans le cimetière, relevées, le terrain repris sans famille pour se manifester
Madame le maire et ses conseillers réunis en ont décidé ainsi !
Les restes des anciens de la commune transférés à l’ossuaire ici
La concession trentenaire, cinquantenaire renouvelable par les descendants
S’il y a encore s’en ficheront éperdument, ne vivant que dans le présent
Déjà aujourd’hui les « chers disparus » sont vite oubliés
Les vivants délaissent les morts auxquels ils étaient liés
Presque autan de crémations que d’inhumations
Les gens préfèrent partir en fumée, ultime destination
A la sortie du four il n’y a plus que des cendres
Une urne funéraire, de fines particules à répandre
Les cendres des défunts dispersées dans les jardins du souvenir
Le vent et la pluie emporteront les cendres pour les anéantir…
Un emplacement Zen, payant pour réconforter les vivants
Ne laissant plus rien physiquement des morts, que du vent. .
Un simple nom gravé sur la plaque du jardin du souvenir
Comme sur le monument aux morts, ça fait réfléchir
Pour les partisans de la crémation c’est le seul repère
Les proches paieront la facture, car mourir coûte cher !
Lors de la dispersion des cendres tout le Saint-Frusquin est là !
Pour accompagner le défunt réduit en poussière dans l’au-delà
Une cérémonie inutile, presque rocambolesque sans corps
Car des cendres dans une urne vidée ce n’est plus le mort
Ma chère sœur est morte à 62 ans, pas enterré mais incinérée, était-ce son choix, je n’en suis pas certain ?
C’est terrible de la savoir morte, le corps grillé et volatilisé, un sort funeste affreux, horrible, inhumain.
Les zélateurs et zélatrices de la crémation n’ont jamais vu un corps brûler
Qui s’enflamme, explose, rougit, se réduit jusqu’à finir par s’annihiler.
De vieilles tombes abandonnées dans le cimetière entourant ! la petite église
Les emplacements désignés, indiqués seront repris, le mort est une marchandise !
Les pauvres ossements sortis de la fosse, du caveau ou laissés au fond
Les restes humains déposés dans un ossuaire, ainsi les fossoyeurs font !
D’autres sans ménagement, sans état d’âme utiliseront le tractopelle
Sortant des pelletées de terre avec les ossements jetés à la poubelle.
Des ossements humains retirés des fosses retrouvés illégalement à la décharge publique
Les employés des pompes funèbres ne s’embarrassent pas, un comportement cynique
Eux aussi qu’ils y pensent ? Finiront dans un tas d’os mélangés à leurs concitoyens
Les morts n’ont plus d’importance, vite éliminés, incinérés, enterrés comme un chien !
Les instances officielles nous volent notre vie et notre mort, obligeant au don d’organes
La famille n’ayant plus son mot à dire, le mort prélevé d’office, le corps qu’on profane.
Où aller aujourd’hui pour se faire enterrer à la mort dignement ?
Sans penser au futur pas si lointain, à tous les bouleversements ?
Mettant en péril notre dernière demeure qui n’est plus hélas à perpétuité
Ici dans ce lieu ce n’est plus possible, le temps de la concession, limité.
La mort est toujours cachée en tapinois…
Nul être ne peut y échapper, c’est la dure loi
Tout début à une fin. Naître c’est tôt ou tard disparaître
Renouvellement des générations, quels que soient les êtres.
En fonction, rien n’émeut, ne touche nos chers élus
Les anciens, morts et enterrés ne les intéressent plus
Les cimetières qu’il faut gérer, conserver, entretenir
Pour eux ces lieux font partie du passé, lointain souvenir
La crémation, tous et toutes n’ont plus que ça en tête…
Tant pis si les morts tombent dans les oubliettes
Les cendres ne prennent pas de place
Les nécropoles sont devenus des jardins public
Des immeubles de bureau, il faut faire du fric…
Là ou les familles en deuil se rendaient, pleuraient, priaient
Respectant les morts et les lieux dans le silence et le respect.