Texte:Un Air Aryen Dans Un Monde Pas Si Gai

Un peu provoc’, me diriez-vous ?
« J’en suis » depuis l’âge de 10 ans environ.
J’ai fait la tournée des clubs et des bars.
L’Internet n’existait pas alors.
J’ai rencontré peu d’hommes, été peu amoureux.
J’ai souffert du manque affectif.
Mon physique n’est pas classique.
J’ai perdu très tôt mon système pileux : cheveux, cils, sourcils, poils pubiens…
Combien de fois effondré après chaque rejet, rupture.
Il y eut un homme que j’ai rencontré à l’époque du Minitel… un autre temps ! Cela a duré sept années. Je l’ai quitté pour vivre le grand amour qui n’ai jamais venu ou du moins je n’ai pas su le garder.
Aujourd’hui, je n’ai pas renoncé, j’ai le désir en berne. Mieux encore, je n’y pense plus.
Je suis mieux depuis quelques mois, depuis que je ne cherche plus l’homme de ma vie.
La seule chose qui compte, c’est la Matrice d’où je viens, l’origine du monde…
J’ai creusé mon sillon.
J’ai parfois tenu la dépression en laisse. Elle m’a souvent mi-dévoré.
J’ai chuté, me suis relevé, pris trop de comprimés, j’ai échoué, j’ai renoncé, j’ai repris mon chemin de vie, j’ai un peu osé ouvrir quelques portes, lâché prise.
J’ai peur de la mort, celle qui peut avaler Celle que j’aime.
J’y pense tout le temps.
L’apaisement, je ne connais pas.
C’est fréquent, chez les bipolaires.
C’est pas très gai mais un peu quand même.
J’ai vu passer des hommes et combien d’entre eux, aurais-je voulu qu’ils m’enlacent, me caressent, me disent trois mots !
Je les voyais main dans la main avec une fille.
J’ai compensé le manque en tourbillonnant dans la musique, les livres et les films.
J’ai beaucoup appris via le cœur, la tête, les émotions.
Je me suis beaucoup tu, mais parlé en longueur à des professionnels de l’écoute.
Aujourd’hui, j’essaie d’être moi-même, j’essaie bien trop aussi de plaire. La comédie est théâtre, pas sur la scène de vie.
Faut-il être vrai tout le temps ?
Déplaire ?
L’enfant qu’on protège, qu’on aime comme il est. On le pousse vers l’épanouissement. On le reconnaît comme capable d’autonomie. On écoute ses angoisses, ses questionnements.
On ne rentre pas dans sa chambre sans frapper.
On respecte son espace vitale.
On évite les reproches humiliants, les comparaisons dégradantes.
Papa quitte maman.
Maman se remarie à un homme impuissant.
Beau papa pousse maman dans les bras d’un ami commun.
La femme trompée l’apprend.
C’est le drame.
Je dois répondre aux appels anonymes.
On me l’ordonne… gentiment.
J’exécute, passif comme un petit soldat.
Je retourne jouer ensuite dans ma chambre comme si de rien n’était.
Le téléphone sonne et sonnera encore plusieurs années.
Je n’ai jamais su prendre vraiment mon envol.
L’une de mes ailes a été plombée.
Il est vital de dormir, j’ai un sommeil artificiel. J’avale un comprimé pour que la nuit passe en un éclair. Le matin, j’ai peur d’une mauvaise nouvelle. J’angoisse à quitter mon appartement et puis je monte dans ma voiture et je me sens à nouveau bien. Je suis pris par le mouvement, les dossiers que je gère, les coups de fils. A la pause de midi, c’est le vide qui s’installe. Je retrouve des collègues. Je fais bonne figure. Je ris quand il faut rire, parfois je suis étonné de prendre du plaisir.
Je retourne à mon bureau. Au fil des heures, la fatigue s’installe, la concentration me joue des tours.
Demain, je reviendrais. Je serais plus fort, du moins, j’espère.
On sera fier de moi, un petit peu.
Depuis quelques temps, je suis sorti de tous les réseaux, les sites de rencontre à l’exception d’un seul, Whatsapp pour conserver l’amitié.
La bagatelle ne m’a jamais attiré, seulement en rêve.
A cette dernière, j’ai toujours préféré le romantisme tendre.
Emily Brontë, Frédéric Chopin, Caspar Friedrich…
Le vague à l’âme de Carson Mcullers.
Je ne suis pas allé voir au cinéma L’Inconnu du lac, si loin de mon mode de rencontre même si Deladonchamp est bon acteur et « so cute ».
A la place, je me repasse du Hitchcock dont : Pas de printemps pour Marnie ou bien Rebecca.
Au sexe, je préfère la suggestion à l’écran.
Dans un livre, je privilégie Amélie Nothomb à Virginie Despentes.
En musique, le piano prend toute la place.
Mon exposé est simple.
Je serai direct avec pourtant quelques détours (cf. ci-dessus. )
De tout ce que j’ai vu m’a fait l’effet d’un retour aryen.
L’Allemagne n’est plus coupable depuis 1946.
La race suprême est à chercher ailleurs.
Dans un glory hole, un sauna, un club qui n’a pas été fermé pour cause de pandémie.
C’est le même type qui remporte toujours à la fin.
Il joue de ses muscles dans les salles et en dehors.
Il va chez le barbier pour encore frimer.
Il domine tout en pouvant être passif à l’horizontal.
Son héros se rapproche de la perfection grecque.
Il est statue parlante et mouvante.
Il est soi élégant soi mauvais garçon pour le frémissement d’une nuit.
Il a peu d’empathie, peu l’envie de se mêler au groupe des différences.
Il oublie la diversité.
Il se droitise.
Il est implacable dans ses idées.
Il porte le verre haut.
La fierté arrogante.
J’ai espéré lui plaire, bizarrement ! Je n’ai pas vu que c’était un adversaire.