Prose:Mélisande

Mélisande au bord de sa tour est rêveuse,
Qui ce beau jour d’été viendra au pied du donjon
Chanter son aubade, quand viendra ce garçon
Aux cheveux d’or qui la rendra amoureuse.

Son père l’enferme dans le chateau depuis sa naissance,
Toujours la même histoire sur les sottes princesses,
Blanche Neige qui fit le désespoir de sa belle-mère
Par l’outrecuidance de ses langoureuses manières,
Cendrillon qui du ménage en avait raz le bonbon
Préférant avec les souris mener une vie de patachon,
Aurore qui ne voulait jamais quitter son lit avant midi
Au désespoir de ceux qui travaillent du lundi au Vendredi,
Qui ouvrira son cœur de Juliette pour son adolescence,
Mélisande rêve de chastes baisers et de prodigues caresses.

Mélisande regarde l’horizon comme la sœur Anne
Mais point de Barbe bleu pour jouer les infâmes,
Quand tout à coup elle entend qu’on l’interpelle,
Tout en bas, sur le parterre elle entend des Mademoiselles.
Elle se penche élégamment et aperçoit un garçon,
Il n’est point laid mais il n’est pas si mignon,
Un peu petit, un peu grassouillet, un peu vulgaire,
Ce n’est point le rêvé Pelleas avec ses douces manières.

- « Qui êtes vous jeune homme, vous me parlez ? »

- « Princesse, je vous aime depuis tant d’années,
Nous savons tous dans cette tour que vous êtes emprisonnée,
Mes frères, mes cousins, mes amis sont venus vous voir,
Tous sont venus pour un baiser de votre part,
Mais je ne sais pourquoi aucun ne sont revenus,
Votre Père les a -t-il retenu ? »

- « Vous dites que beaucoup sont venus me voir,
C’est étrange je ne me souviens pas d’eux,
Je suis seule du matin au soir,
Personne pour me parler, pauvres malheureux. »

- « Princesse, il faut que je monte vous parler,
Comment franchir cette douve profonde et sombre,
Comment monter jusqu’à votre balcon sans encombre,
Aidez moi, je ne peux pas voler… »

- « Jeune homme, je vais répondre à votre souhait,
Mes cheveux sont forts longs, une mèche libérée
Et voilà une solide corde pour monter,
J’espère que vous êtes agile pour grimper. »

Le jeune garçon agrippe la mèche
Puis commence à monter,
Mais il n’est point léger comme une flammèche,
Il est lourd comme un baudet.

- « Oh comme les autres vous êtes lourd,
Vous me tirez les cheveux à me rendre sourde,
Désolé mon mignon mais je prend mes ciseaux,
Je vais couper ma mèche illico. »

Aussitôt dit, aussitôt fait,
Le garçon chute dans la douve
Et rejoint les autres noyés
Squelettes posés dans la boue.

- « Oh quand viendra mon léger amant,
Aussi fort et beau qu’Apollon,
Je vais devenir chauve avec tous ces manants
Ah Papa m’avait bien dit de me méfier des garçons. »