Prose:Precieuse Pierre Fine

Elle attirait mon regard comme les feux de rubis le font si bien. Il m’était impossible de m’en détacher, quand bien même je l’aurais voulu. Je l’admirai comme on observe le reflet des plus beaux ciels rose d’orange dans la clarté de l’eau d’un lac d’émeraude. Un tourbillon charmeur de citrine magique brillait dans le creux de ses yeux, un siphon qui m’a entrainé au delà des limites du monde, là où le topaze n’est qu’une banalité. On peut passer toute une vie à scruter les profondeurs de la Lune, des lunes, elle en a deux sur le visage.
Elle fût l’agate baume de mes moments moroses, le lapis lazuli qui m’eut enveloppé le cœur de tendres finesses. Elle fût dans mes rêves comme la malachite vêtue de fourrure ambrée. Elle m’a transformé comme on change le sable en verre. Elle a fait du gris grès que j’étais une grenade de grenat qui gravit son corps et explose sans dégât. Elle qui fût ma tanzanite chauffée d’amour turquoise. Elle m’a touché aux profonds de mes sens, laissant l’aigue marine du désir faire de moi un dévoué de porcelaine à la peau de tourmaline.
J’étais à ses côtés comme dans un musée, contemplant la beauté sans pouvoir la garder. Un cristal de musée. Trop beau pour comprendre comment il a pu être créé, mais assez pour le regarder durant le reste de ma vie. Cette rare pierre précieuse est la perle apothéose de ce qu’un géologue de l’amour rêverai de trouver un jour. Dorénavant elle n’est plus qu’un fossile au goût saphir qui laisse une marque de jade en ma mémoire d’obsidienne.
Maintenant qu’elle est partie, je suis un papillon d’amnésie aux ailes clouées dans le vent, qu’une tempête viendra balayer. Un cocon muté en manque de son péridot. Je peux déployer mes ailes et quitter le diamant de son monde, ou bien les couper et me terrer dans l’antre du mutisme cardiaque. Je trahis ce que je suis sous un faux nom, ou bien je m’immortalise dans la douceur de sa respiration. Je me cache de mes propres intentions car je ne comprends pas que je suis quand je suis face à cette femme au regard d’améthyste.