Poème:La Cloche

De cette envie de vivre qui le faisait marcher,
De ce besoin d’amour qui le faisait rêver,
Il a fermé le livre dont il était l’auteur
Empêchant tout retour vers un passé diseur.
Il ne supportait plus chaque jour trop dicté
Où ses moindres pensées étaient analysées,
Où les propos diffus de vils péroreurs
Chaque fois le blessaient en déchirant son cœur.
Pourtant,
Dès l’aube de sa vie,
Il avait tout écrit
Portant ses utopies
En illusoires récits.
Pourtant,
Sans fausse modestie,
Il s’était investi
Portant comme l’hostie
Ses mots, ses ressentis.
De cette liberté qu’il avait encensé,
De ses espoirs posés sur une étoile aimée,
Il ne reste plus rien que des projets anciens
Des hoquets jurassiens aux relents cornéliens.
Il ne veux que cette heure vécue en visiteur
Et nul autre projet que celui d’exister
Loin de toute demeure, de tout téléscripteur,
Hors de toute portée le faisant encroué.
Aujourd’hui il n’est plus qu’une ombre de la rue,
Un vulgaire inconnu sans toit et dépourvu.
Il va, inaperçu, sur les trottoirs cossus
Où la foule ventrue se moque des exclus.
Aujourd’hui,
Il n’est qu’un filigrane, impénétrable arcane,
Qui va et vient, et glane, quelques rimes profanes
Rangées en lignes insanes dans sa tête scribanne.
Et, peut-être un jour, juste avant de mourir,
Aura t’il sans détour le courage d’écrire.

Manu Edouard Moulin