Poème:Les Évidences Claustrophobes

J’erre de lumières en lumières
Je ne sais pas qui je suis
Mais j’ose dire je

Je marche de trottoirs en trottoirs
Je ne suis pas une voiture
Mais je vis comme si

Je dévale de pentes en pentes
Je n’ai pas mis de fart
Mais je me fais confiance

Je me déploie dans l’atmosphère
Je suis au dessus de la mer
Je nage déjà dans l’air

Je digère de menus en menus
J’ai à peine commencé le premier
Que je digère déjà le second

Je m’afflige de sanctions en sanctions
Mais je purge ma première punition
Que je m’inflige déjà la seconde

Je m’adapte d’épreuves en épreuves
Mais sitôt que je fais mes preuves
Je dois affûter encore un éperon

Je tente de savoir de leçons en leçons
Je sais déjà ce qu’apparemment j’apprends
Mais je l’apprends quand même

Je fais des vers de sonnets en sonnets
Je suis siphonné de ce tourbillon
Mais mon siphon est plein de poussière

Je me dégénère d’aliénations en aliénations
Je me cherche moi-même comme un étranger
Suis-je assez sot pour ignorer le miroir du salon ?

Je me régénère, je pêche, de poissons en poissons
Je ne tire de l’eau que des bottes et des pneus de Cadillac
Je cuisine le caoutchouc fondu dans des chaudrons

Je suis une bête, un cloporte à qui l’on ferme les portes
Mais je passe en dessous, et ma foi quand je marche
La cohorte m’emporte ; sous vos chaussures il gît mon tombeau