Poème:2001- Début De L’odyssée

Ma fille

Quand la sage-femme, ce jour-la nous annonça,
Pour déjouer le drame, que le scalpel sera,
Ton issue de secours. J’ai pensé à maman
Supporter encore ce souvenir, ces moments

Cachés au fond de notre mémoire, et oubliés.
Rouvrir cette cicatrice laissée par ton frère
Et revivre ce supplice où la mort suggère
Sa timide présence, et la vie aussi est vite conseillé.

Avoir le choix du roi et être le plus heureux
Des hommes et entendre encore Césarienne te souffler
A l’oreille, que sans elle, on n’aura que nos yeux
Pour pleurer et nos veines bleus à les entailler.

Seul dans le couloir, à la maternité je pense
A ta mère, et de Dieu je demande sa clémence.
De ma solitude, j’ai pris énormément conscience
Du rôle des femmes dans ce monde et de leurs souffrances

Oh l’attente fut longue Puis des portes battantes
Tu es apparue dans ta cage en verre, éclatante
Sur le dos, les petites menottes en l’air, le regard réfléchi
De ta nouvelle frimousse, de bonheur j’étais avachi

Sur le plexiglas, où tout autour de moi paraissait flou
Mes yeux n’avaient que toi dans leurs lignes de mire
Aucun barrage dans le monde ne pouvait retenir
Mes larmes de joie et de soulagement. Comme fou,

Entre délire et fatigue, j’ai requis des nouvelles
De ma moitié. Enfin rassuré, et comme une âme
Errante je vous ai laissé, et j’ai remercié le ciel
Et essayer d’oublier ce malheureux mélodrame.

Plus tard, avec ton frère, penché sur ton couffin
Et ta mère allongeait, heureuse de t’avoir enfin,
J’ai su dès lors, que je serai à votre merci à vie
Comme un condamné prêt à être asservi.

De feu ma grand-mère, tu portes son prénom
Trouver le jour même, à la Sainte Ninon.
Beau bébé, silencieuse toujours estimé
T’es la seule à qui, l’envie de te porter

Me prenait souvent, légère et souriante
Toujours une occasion de vouloir te câliner
Dans mes bras, à te sentir et te caresser
Précieuse de toutes les pierres brillantes.

Voila ma reine, le début de ton histoire
Mais pour la fin de la nôtre, j’espère t’avoir
Près de maman et moi, à assister nos peines
Et à supporter nos vieilles rengaines.

Pour toi ma reine.