Prose:La Prière Du Chien Errant

Sous le réverbère tremblotant,
Un chien traîne sa carcasse creuse,
Comme un bateau éventré sur un rivage d’asphalte.
Ses côtes cognent contre sa peau
À chaque pas comme un tombeau de famine.

Ses pattes claquent sur le pavé comme une prière.
Ses yeux, deux éclats de nuit,
Racontent la faim, le froid, l’oubli.
Les passants passent,
Emportant leurs soleils intacts,
Sans voir la neige qui s’amasse
Sur son dos comme une dernière caresse.

Il s’arrête devant une vitrine éclatante
Où festoient des mains humaines,
Et lèche l’air,
Parfumé de gras et d’abondance.
Personne ne le regarde.
Certains détournent les yeux,
De peur que la honte ne s’accroche à leurs pupilles.

La neige fond sur son museau
En gouttes lentes, comme des larmes qu’il n’a plus.
Son corps grelotte,
Son âme s’efface.

Mais dans mon cœur,
Je rassemble chaque cri muet de la terre,
Je jure, à vous, bêtes meurtries,
Vous qui êtes le sang et le souffle du monde,
De vous offrir, si je le pouvais,

Mieux qu’une arche perdue dans le déluge :
Une planète entière pour rester…
Un monde où chaque souffle serait un refuge,
Où nul n’aurait plus jamais peur,
Où les mains ne frapperaient plus,
Où chaque mot serait tendre,
Et où votre Vie vaudrait enfin plus que le silence.