Poème:Ne Dites Pas Son Nom

On l’appelle pudiquement la fin de la vie,
La fin du chemin, ou par d’autres mots.
C’est un tabou dont on n’ose parler.
Encore moins la chanter.

C’est la douleur, le malheur, la séparation.
C’est la tristesse dont on ne revient jamais.
Le blanc selon les pays, le noir chez d’autres,
Une joie, une fête chez certains apôtres,

Une victoire pour les uns
Une défaite pour d’autres.
On la trouve pour d’aucuns,
Elle est toujours terrible chez les vôtres.

Elle est voulue par certains,
Parfois même suppliée.
Honnie par des êtres aimés,
Autorisée par la loi chez des voisins.

Tout le monde en parle, dans les journaux,
A la télé, on la montre, elle fait vendre du papier.
Elle fait causer dans les bistros,
Certains même disent que la vie elle l’a volée.

Alors que la victime la voulait,
Allez donc comprendre qu’à ce point
On la craigne alors que pour certains c’est un gain
Un profit, un commerce, voire même une publicité.

En tous cas, tout le monde en parle…
On en fait partout la une, un sujet de décorations.
Pour certains, on s’en frotte les mains, c’est la fortune.
On rit de celle du riche, qui n’aurait jamais donné son pognon !

C’est le monde à l’envers, tout s’écroule
Pour d’aucuns c’est une roue qui tourne
Et qui a toujours le dernier mot : celui de la fin !
Aujourd’hui tu es là, peut être pas demain, le destin…

Elle est comme l’amour et fait tourner le monde.
C’est toujours une honte quand elle est immonde
Nous ne sommes que fourmis de passage.
On n’est que poussiere, petits grains de râtissage.

Parfois on laisse une trace, une construction,
Pour un Dieu, une entité qui remplace un manque d’instruction…

Puisqu’on ne sait pas ce qu’il y a après la vie,
Alors on se réfugie dans une religion.

On la craint, on la fuit dès qu’on entend qu’elle gronde,
Même si entre peuple on sait si bien faire la fronde.
Alors on se traîte, on s’injurie, on se fait la guerre
On abjure les uns alors que nos canons grondent.

Oui mais là c’est normal, ce sont eux qui ont commencé.
Nous, on fait que se défendre même si c’est dans la honte.
Ce sont les autres, les salauds, les immondes,
Qui viennent souiller de leur sang nos illustres sillons.

On se défend, nos couleurs bleu blanc rouge.
Peut importe la couleur de ceux que l’on tue,
Puisque de toute façon leur sang est rouge,
De la même couleur du drapeau que l’on purge.

Tout cela pour une terre qui nous est si chère !
Car on a appris à l’école, que ceux d’à côté
N’avaient surtout pas de droit de dépasser les pointillés !
Sinon c’était « casus belli » car le patois parlé

Derrière ces petits traits que deux langues séparaient,
Représentaient d’immiscibles et terribles intérêts
Qui, quelques années après, deviendraient par destin,
Que dis-je, par miracle, soudainement communs.

Enfin derrière tout cela il n’y a que de pauvres humains
Qui une fois calmés buvaient avec des uniformes
Différents, leurs petit blanc sur le zinc du café du coin
Et se serraient fièrement, tous en rigolant, leurs pognes.

Mais toujours sans parler d’elle, qui rôde toujours
Dans le coin, dont on tait le nom mais n’en pensant pas moins.
On lui donne tous les surnoms, on l’appelle l’aigle, le vautour
Mais de pays en nations, de mers en continents, en faubourgs

Par la guerre, accidents feux, ou non quelle qu’en soit la raison
Tous le monde la connait, l’a vue même parfois de près.
Paraît qu’elle fait froid dans le dos même si c’est pas vrai.
En tous les cas, son nom on en parle même avec des surnoms.

Mais surtout, faites bien comme moi
Je ne suis pas à part les autres, vous le voyez bien que je tourne en rond,
Que j’en parle depuis un moment, mais j’suis comme toi,
J’en ai peur à un point tel que je n’ose dire son nom.
Je fais comme tout le monde, toi, vous, nous…
Vous m’avez compris alors chut, elle tourne
Pensez le en silence, c’est le mieux mais si dans la tête ça vous tourne
CCCHHHUUUTTT ! ! ! Ne dites pas son nom…