Poème:Rien. .

Je ne suis pas taillé pour croire aux faux présages
Qu un néant tout puissant enverrait en grand sage
Pour sauver du naufrage de vivants équipages

Car l’existence exige que le Rien agonise
Et leurs présentations ne sera pas de mise
À moins qu’un imposteur ne vienne et se déguise

Et c’est moi l’imposteur qui fait mon escalavage
Quand à tous mes ratages je viens rendre l’ hommage
Et permets au néant d’être un vivant mirage

Tout ce qui n’a pas pris corps et qui me tyranise
J’aime le croire créé par un bourreau d’assises
Tronant au banc du Rien sur qui il a mainmise

’Rien’ a besoin de moi pour marquer son passage
Et c’est moi qui l’enfante par mes idées de rage
Et c’est moi qui le cite aux pieds de mises en page

Mais jamais je n’ai vu sa longue robe grise
Je n’ai vu que l’écho des amours qui se brisent
Et l’évaporation de mes anciennes emprises

Car ’Rien’ ne m’a rien pris et n’a pas de langage
Et c’est bien ce qui fut qui me garde en otage
Car ce qui ne fut pas ne peut porter l’outrage

Ce qui fut s’est enfui emporté par la brise
Qui souffle sur mon coeur pour que je cicatrise
Et c’est moi qui entretient pour de ’Rien’ la méprise

Que mon esprit avare enferme au sarcophage
Afin de se sauver des tristes ermitages
Ou l’avaient amené mes cruels pillages