Prose:Le Général Hiver

Palissant dans l’éloge d’un grand froid
Des perce-neiges tranquilles
Grelottent
Et se demandent en claquant des quenottes
Quand l’aube beige poindra.

Dans les taillis au fond des bois,
Les futaies mortes, et finalement toute une société
Attendent l’heure pour renaître
A la vie
Et
Que fuie le sévère général hiver…

C’est ailleurs des remparts de caillasses que
Le frisson s’empare
De fortes têtes et des caïds voulant éclore
A la vie, trop brusquement.

Un charbon de bois malicieux entre des doigts gelés ;
Des théâtres de flore apparaissent
Et des tas de lys amoncelés fatiguent
Le lierre cassant, qui rompt sous les névés qui l’agressent.

Aussi loin que porte la mémoire
Au-delà du Temps, dans les ombres sénescentes
Où même un chantre d’horizon admet ses faiblesses
Chacun maudit
Le taudis de mauvaise messe
Où l’âme dépérit
Face à son hiver implacable.

Il se dit entre gens bien
Que Nature, à ses heures,
Aime à éprouver les siens,
Ôte à ses beaux hôtes
La chaleur du calice
Pour le froid impétrant.

Les plier à sa guise… Voilà sa sainte idée !
Et en faire des églises, des cloaques sans cheminée !
Au fond, n’est-il navrant de se taire,
Face à la sainteté
Quand
De froid il est question
De froid et de piètre matité.

Demain, il paraîtra la linotte
Sur sa branche
On la verra toute blanche, elle, sotte…
En habit de soirée… Enfin ! ne fut-elle jamais plus gaie ?

Sur sa branche,
Empesée d’une ravissante neige
Des habitants faux gracieux viendront
Un crocus à la main et un bouquet de liège
Rendre hommage
Et porter en l’église
Un cierge
Pour que cesse cette tristesse.

Lors qu’Eole aura déjà au ciel
Soufflé – tonitruant ! –
Ritournelle et sa poussiéreuse rengaine
Nos héros dociles et le nez au vent
Humeront l’air dans l’espoir
D’y voir
L’été ;
D’un air complice et connivent.

Et
Sans qu’il ne soit possible
De les en dissuader
Croire est Nature’l, Elle le sait !
Qu’un jour le Commandant passera via le trépas
Je partirai, vois-tu
En moi-même plutôt fier
D’être aussi leur sociétaire.