Prose:Mes Racines

Avant de mettre au monde mes enfants, je n’avais pas trouver ma voie professionnelle, je tâtais ce parcours quand un homme m’a rattrapé et avec lui, l’abandon de mes ambitions ! J’aspirai tellement à poursuivre mes études, me donner le pouvoir de la culture, la porte d’un bel avenir, l’amour m’y a fait renoncé… l’amour, maître de ma vie… l’amour traître !
Un goût d’amertume pour l’inachevé, pour l’inaccompli, pour ne pas avoir été au bout de ce que l’on a désiré et voulu, alors, j’ai réouvert mes livres… mes livres du quotidien pour ne pas oublier que mes parents n’avaient pas eu cette chance, la chance de pouvoir aborder les mots, de les lire, de les écrire, d’ouvrir leur esprit à d’autres cultures en dehors de celle dont ils n’ont pas eu d’autre choix que d’y baigner ! Ils ont appris de leur vie, de la guerre d’Algérie que mon père a dû faire, l’arrachant à sa jeunesse, des huit enfants que ma mère munie de son courage a fait grandir, de leurs vécus tellement riche mais tellement rude, pour leur courage, je les honore de la légion d’honneur en plus des médailles d’anciens combattants que mon père a rangé au fond d’un tiroir et de celle de ma mère pour sa famille nombreuse française. Mes parents se sont battus dans un pays dont ils n’étaient pas originaires, dont ils ne parlaient pas la langue et dans lequel ils n’étaient que des immigrés aux dires de ses occupants, ils ont su écrire leur histoire en la gravant dans ma mémoire, mes parents, ces héros !
Ce qui va suivre en est la suite logique, j’ai grandi dans l’atmosphère difficile de la lutte d’un état civil étranger où les valeurs omniprésentes de mes parents prenaient le dessus et où la façon de se tenir était réprimandé, le fait de se faire convoquer par un professeur du corps enseignant était au sein familial, un pas à ne pas transgresser, j’eus l’instinct animal de ne jamais m’y frotter ! Ne pas faire de vagues dans un pays qu’il fallait conquérir, où il fallait être accepter, après tout, cette France, terre d’accueil, elle méritait bien ce respect et notre entière reconnaissance quitte à croupir sous elle ! J’étais contre cette idée, je suis née ici, avec les mêmes droits et devoirs que les autres enfants de mon âge, je suis née là, sur le sol français et je suis l’égal des autres citoyens ! Foutaises, étrangère tu es, étrangère tu resteras, il y a juste à regarder tes cheveux qui frisottent dès qu’il pleut comme pour te rappeler que tu n’es pas d’ici, il y a juste à regarder les yeux des occidentaux qui ne voient chez toi que le fanatisme d’un pays et sa misère, ne s’attachant plus à son peuple et à sa peine de ne voir que la violence des ruines tout autour ! Moi, je n’oublie pas le temps des cerises où mon père dans son jardin s’endormait sous son olivier, je m’installe à son pied, à son antre et j’y enterre précieusement mes racines pour ne jamais oublier que c’est de lui que je suis faite et que mes larmes ne sont que le fruit de son immensité ! Tout ce qui sommeille en moi, tout ce qui grandit à l’intérieur, tout ce que j’ai pu voir ou entendu, tout le temps qu’il m’a fallu pour comprendre et pour accepter, tout ce que j’ai bâti et qui n’était que château de cartes, tout le mal pour que j’y parvienne et pour que l’on me l’enlève ensuite, toute la volonté à essayer de se reconstruire, se retrouver en face-à-face, toute la patience déployée à trouver ses trésors, toute la solitude ressentie comme si la Terre n’avait jamais été occupé avant, à en être seul maître et chercher l’oxygène que l’on ne trouve pas, privée de toute formule, à escalader des monts et des monts dont les sommets ne sont que mirages, à toute la force dont j’ai fait preuve pour surmonter mes blessures, mes douleurs, à mes chagrins comme des plaies ouvertes que j’essaie encore de cicatriser, à ma fragilité restée telle quelle de m’avoir vu descendre si bas !
Je suis riche de ce qui m’est arrivée, la seule différence entre les êtres, est la perception, leur perception aux choses ! En moi, le voeu de voir et de ressentir tout ce qui m’entoure, tout ce qui découle de cette rivière limpide en attendant de se jeter dans la mer, j’attends de goûter à sa pureté, son excellence… j’attends qu’elle me reconnaisse dans son reflet.