Prose:Mon Ex À L’expo

J’avais reçu en début de semaine, une invitation pour un vernissage d’un jeune artiste peintre. Il venait de finir son cursus aux beaux arts, et grâce à quelques mécènes sa première exposition avait lieu. C’était donc ce jeudi soir que rue de Rivoli, du coté des arcades que j’aperçu mon ex, Catherine. Nous nous étions rencontrés dans les années Quatre vingt dix, je travaillais comme pigiste à Libération, radio nova. Elle était d’un famille bourgeoise, un grande famille d’industrielle qui fréquentait les soirées Canal plus, elle accumulait les lignes dans les toilettes des bains douches, dansait sur la musique industrielle. Rien ne semblait nous rapprocher, elle me semblait snob, branchée ; pour elle mes allures de gauchistes étaient déjà une aventure.
Nous nous sommes embrassés au deuxième rendez -vous du coté du forum des halles, elle s’émerveillait devant les mobiles, prenait la pose devant les tableaux, me questionnait sur les performances des artistes en live. La journée ne pouvait se conclure que dans mon appartement, le lendemain matin nous étions amants. Je ne vous raconterai pas les deux années suivantes, elles se terminèrent comme un chaos, elle me laissa un mot : « Chéri, nos différences de classe sont trop importantes, arrêtons de nous mentir. notre histoire ne mène à rien, je sais que tu penses comme moi, adieux. »
La revoir vingt cinq ans après, toujours aussi belle fut un choc, à ses cotés un jeune homme d’une vingtaine d’année lui tenait le bras, mon ex était elle devenu une cougar, une dévoreuse de minets ? Je fis semblant de regarder des bouquins dans une vitrine pour l’observer traverser le boulevard, ses jambes étaient toujours de merveilleux compas, longues, fines, aux bas noirs si troublant. Elle passa de mon coté et fila sans me remarquer, je repris mon chemin tout en les suivant, le jeune homme posait sa tête sur son épaule, riait en silence, murmurait des mots à ses oreilles. Nous arrivâmes finalement à la galerie, je ne fus guère surpris de la voir entrer. Je montrais mon invitation aux cerbères et à mon tour j’y entrais.
Je retrouvais quelques journalistes du coté du buffet, il est toujours extraordinaire de voir ces confrères engouffrer les petits fours, à peine la bouche dévorait un canapé que les doigts habiles se saisissaient d’un autre. La main gauche quant à elle prenait un verre de champagne. Je pris une coupe et me rafraichis avec un champagne qui me semblait un peu tiède. J’aperçus alors Juliette, elle était devenue au fil des années une amie, me procurait avec diligence des invitations pour les vernissages.
- « Ah te voilà enfin, je me demandais si tu n’allais pas me poser un lapin. Viens je vais te présenter l’artiste, il a un talent fou ! tu vas rire il est venu avec sa maman, c’est tellement mignon ! »
Elle m’attrapa par le bras, je posais la coupe sur un coin de table. Nous traversâmes l’assemblée, j’entendais les discussions par bribes, . Le jeune homme devant des tableaux posait, il recevait les félicitations en souriant. Je compris alors ma grande bêtise, il était le jeune artiste, le compagnon de mon ex, son fils. Catherine se retourna en entendant Juliette les appeler,
elle me reconnut, je vis une petite grimace d’un instant suivie d’un sourire narquois. Je félicitais le jeune homme, souriait à mon ex, puis rien ne se passa. Il en est ainsi, le temps perdu ne se rattrape plus, les années étaient passées entre nous, les sentiments s’étaient éteints. Je quittais la soirée avec Juliette, quelques amis journalistes en direction d’un bar ouvert la nuit.
Quant à savoir si le jeune homme avait le moindre talent, je ne saurais vous le dire, personne n’est parfait…